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24 janvier 2023

SOUTIEN à tous les artisans ET STOP à cette folie

Kelly Scott

J’ai appelé ce matin la boulangerie en question pour savoir si c’était vrai car complètement fou.
Boulangerie Claudel à Bollwiller (Haut-Rhin).

Photo jointe, une dame très gentille m’a répondu.

Tout est véridique ! Le montant réclamé est réel et d’autres boulangeries et artisans vivent le même cauchemar !

Ils ont affiché cette facture chez eux dans leur commerce.

Ils ont prévenu la presse.

EDF pour l’instant ne donne aucune réponse.

Je leur ai dit que nous les soutenions.

C’est juste invraisemblable, incroyable et insupportable.

S’ils doivent payer, ils fermeront évidemment mais il faut absolument qu’ils ne se laissent pas faire !


Vers des jours difficiles ?

Gilles La Carbona

Les nuages s’amoncellent dans le ciel de Macron. Jusqu’à présent, le président s’en est toujours sorti, soit en jouant le pourrissement, soit en affichant un superbe mépris et parfois les deux en même temps. Mais il s’agissait en général d’un problème unique et interne. Cette fois les choses sont un peu différentes. D’abord il y a cette fichue réforme des retraites. Elle pourrait passer en force, ou avec la complicité des LR, puisque ces derniers ont pactisé en « presque secret » avec le pouvoir. Cependant les syndicats ne semblent pas vouloir lâcher du lest et ils ont avec eux au moins 70% des Français, qui ne veulent pas de cette réforme. Ils ont un peu de temps devant eux pour préparer leurs arguments et surtout les salariés, à des blocages de plus en plus durs. Macron pourrait-il supporter une paralysie du pays, même partielle, de plusieurs semaines ? Le pari est osé.

Dans ce cas il lui resterait deux options. Retirer ce texte, que le COR ne cesse de qualifier d’inutile, puisque l’équilibre financier n’est en rien menacé dans l’immédiat du moins, il l’a encore martelé la semaine dernière. S’il fallait 10 milliards pour en assurer la pérennité, on se dit que l’effort n’est pas si dantesque que ça, puisqu’on ne cesse d’inonder l’Ukraine de milliards, pour rien. Ou, seconde solution : faire un référendum. Plusieurs intervenants le réclament, Macron lui-même, l’avait évoqué durant sa campagne. En choisissant cette alternative il ne se dédierait nullement. Bien entendu l’issue du scrutin pourrait l’affaiblir, si elle était négative. Mais connaissant l’homme, il resterait en place, arguant que ce n’est que l’expression du peuple, non un plébiscite sur sa personne. De plus, rien n’est écrit dans la constitution lui intimant l’ordre de démissionner en cas de désaveu. Déjà que ce qui est écrit il s’en fiche, alors ce qui ne l’est pas...

À ce problème, se rajoute celui des effets secondaires des vaccins, de plus en plus difficilement escamotables. Bien entendu la France reste championne en matière de mutisme sur le sujet. L’évitement est de rigueur et quand bien même un certain malaise est parfois palpable chez les journalistes, ils s’en sortent par un silence de circonstance, le regard absent, ou plongé dans des notes imaginaires. Les services des pompes funèbres sont débordés, mais pas de panique, les gens meurent brutalement, mais c’est la faute à pas de chance. Le nombre de bébés mort-nés a explosé, mais la dignité impose qu’on taise tout cela. Jusqu’à quand cet argument suffira-t-il à contenter les familles des victimes, ou les patients blessés à vie après les injections ? Mystère.

Dans « le même temps » Macron semble empêtré avec l’Ukraine. Il a joué les fier-à-bras, s’est permis l’envoi de canons et de chars ALX10, sans demander l’autorisation à l’Assemblée nationale. Il s’est même autorisé à dire qu’aujourd’hui, on ne déclarait plus la guerre, sous-entendu, je fais ce que je veux et l’article 35 de la constitution je l’ai biffé, quand on vous disait un peu plus haut que le texte de la constitution il en faisait son affaire ! Mais ici, la complaisance des journalistes ne le sauvera pas, ni même le 49.3 ou l’alliance LR. Il n’a pas en face de lui des roquets achetés à grands coups de subventions ou de promesses diverses, mais un chef d’État puissant. Il semblerait que la patience de la Russie approche de son terme et l’évocation du don des chars Leclerc a quelque peu énervé Poutine, tant et si bien qu’on a vu le prince président intervenir pour un début de rétropédalage discret, avec la mine déconfite. Les gesticulations seraient-elles sur le point de se terminer, et le temps ne serait plus aux mots ni aux déclarations, mais aux actes ? On sait qu’en la matière, quand le Russie passe ce cap, ça fait très mal.

Le prince président serait donc trop bien corseté dans toutes ces affaires, pour rester serein, d’autant que pour l’un des dossiers, il lui serait impossible de jouer les hautains, les méprisants, il devrait se frotter à la réalité de la guerre et personne n’est prêt. C’est une chose d’envoyer des CRS taper sur des gens désarmés, c’en est une autre d’affronter une vraie armée. On l’a vu dans le Dombas quand les Ukrainiens terrorisaient les populations russophiles, ils jouaient les cadors, dès qu’ils ont eu en face d’eux des soldats armés, ils ont détalé comme des lapins. Il le sait et c’est ce qui le rend maussade. Il ne peut plus rouler des mécaniques, comme avec les manifestants français.

Si l’on cumule ces trois événements qui semblent converger à grande vitesse, on peut penser que les jours qui arrivent vont être très compliqués pour lui. On peut encore ajouter l’inflation galopante. Il devra donc faire des choix. Soit s’entêter sur tous les sujets, et risquer d’entrer ouvertement en guerre avec la Russie, ce qui sonnerait la fin de son quinquennat et sans doute de la France tout court. Soit abandonner les positions les plus inconfortables, la Russie et les retraites. Mais son quinquennat serait quand même bien entamé... quelles seront ses priorités ? Lui seul le sait et encore.

Pierre de Gaulle : « Ils ont détruit la France de mon grand-père ! »


Yann Bizien

☐ Je voudrais que le pouvoir puisse entendre très clairement ceci : avant de prétendre aider l’Ukraine à défendre quoi qu'il en coûte ses frontières, jusqu'à organiser notre propre désarmement, il serait plus que temps de penser et de s’occuper d'abord des nôtres, abandonnées, délaissées et violées en permanence. Il n’est pas normal que la France, si prompte à défendre les frontières des autres, fasse si peu pour assumer la responsabilité des siennes et préserver sa souveraineté. Une Nation souveraine fait respecter le droit international a ses frontières. C'est elle qui décide qui peut entrer sur son territoire, ou pas.



☐ Alors que le peuple descend dans la rue, l'exécutif qui annonce en même temps le report de l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans pour l'équilibre comptable de notre système, et l'augmentation du budget des armées, semble perdre la bataille de l'opinion. Le taux de satisfaction ciblé sur Emmanuel Macron chute en effet à son plus bas niveau depuis le premier confinement de 2020. Le chef de l'Etat semblait protégé jusqu'ici par un épais glacis malgré ses déclarations culpabilisantes, brutales, outrageantes et blessantes. Mais il perd aujourd'hui et de façon très significative l'estime des actifs et des chômeurs. Les Français redoutent de mourir au travail ou la précarité d'une retraite plus courte. Et rien, aucun élément de langage gouvernemental, ne les fera dévier.



☐ Simple et implacable : le Ministre de l'Éducation nationale, qui dispose du premier budget de l'État entre ses mains, n'a plus la cote parce qu'il n'est pas du tout à la hauteur d'une responsabilité historique et d'une mission impossible à réussir avec ses préjugés idéologiques. Ministre de l'ombre, qui ne sait pas s'imposer, il peine à saisir les enjeux de l'Éducation nationale. Sans courage, il éprouve des difficultés à décider et à assumer franchement une politique éducative basée sur la rigueur, l'effort, le mérite, l'excellence et le respect de l'autorité. On ne fait pas une politique éducative avec pour seuls slogans la mixité sociale et l'égalité, Monsieur le Ministre.


23 janvier 2023

« Les classes moyennes ne croient plus et n'écoutent plus ceux qui les dépossèdent »

Interview de Christophe Guilly, géographe, parue dans le Figaro du 23/1/2023

Pour ce géographe, la réforme des retraites et l'opposition qu'elle provoque ne sont qu'un pâle reflet du malaise beaucoup plus profond qui hante la société française. Celui de l'angoisse existentielle d'une classe moyenne fragilisée par les effets de la mondialisation, de la métropolisation et de la gestion des flux migratoires. Si cette « majorité ordinaire » est, selon lui, de plus en plus défiante à l'égard d'un pouvoir qu'elle considère dépourvu d'un véritable dessein politique, elle n'est pas anti-élitiste pour autant. Elle cherche, au contraire, sans la trouver, une élite qui partagerait son diagnostic et pourrait la représenter.

LE FIGARO. - La réforme des retraites restaure une chorégraphie sociale qui correspond à ce que l'on connaît depuis trente ans sur ce sujet. Dans la charge symbolique et politique que l'on donne à cette réforme, retrouvez-vous les inquiétudes des classes populaires sur lesquelles vous travaillez depuis des années ?

Christophe GUILLUY. - Comme dans le film de Patrice Leconte (Les Grands Ducs) les vieux comédiens sont de retour : le gouvernement qui réforme, les syndicats qui manifestent et les médias qui font de la pédagogie. Le spectacle a effectivement un air de déjà-vu et surtout il est joué par des acteurs (politiques, syndicats, médias) qui aujourd'hui ne suscitent plus que de la défiance. Comme d'habitude cette énième réforme provoque un énième rejet comme le montre la forte mobilisation notamment dans les petites villes et villes moyennes de la France périphérique. Pourquoi ? C'est moins du côté du contenu des mesures qu'il faut chercher la réponse que du côté de l'absence de sens de réformes qui ne s'inscrivent dans aucun dessein politique mais seulement dans un mécano technocratique. Le seul objectif semble être de répondre aux normes d'une économie mondialisée dans laquelle la classe moyenne occidentale est en fait trop payée et trop protégée.
Aujourd'hui, les classes populaires et moyennes ne croient plus et n'écoutent plus ceux qui, depuis des années, les dépossèdent de ce qu'elles ont et de ce qu'elles sont sans jamais leur proposer d'autre horizon que celui d'une société du rationnement. Pilotée par une technostructure qui a démontré depuis bien longtemps que le bien commun n'était pas son sujet, cette énième réforme illustre bien la volonté d'être en marche mais en marche vers nulle part.
 
Vous parlez d'instinct de survie, d'angoisse existentielle. Qu'est-ce qui selon vous menace ces catégories d'effacement ?
 
La contestation sociale et politique d'aujourd'hui, n'est pas un remake des Misérables, elle n'est pas un soulèvement de « pauvres » et ne vise pas non plus l'obtention de nouveaux droits sociaux. Elle n'est pas portée par une aspiration à un « nouveau monde » mais au contraire, elle vise la poursuite de l'ancien ; un monde où la majorité ordinaire était encore au « centre ». Au centre des rouages de l'économie, au centre des préoccupations de la classe politique et au centre des représentations culturelles. Cette révolte est animée par la conviction d'avoir été dépossédé de ses prérogatives, d'avoir peu à peu été mis au bord du monde. Ses ressorts profonds, et c'est bien là sa spécificité, ne sont pas seulement matériels, mais surtout existentiels. Cette dépossession est d'autant plus violente qu'elle s'accompagne d'une perte d'un statut essentiel : celui de référent politique et culturel. Cette angoisse existentielle est renforcée par le refus des élites de reconnaître ses trois échecs les plus saillants sur la mondialisation libérale, la métropolisation et sa gestion des flux migratoires.
 
Diriez-vous que des décisions ou des transformations comme la fin du timbre rouge, la crise des boulangers, l'extinction des commerces dans les villes moyennes... participent de cette inquiétude ?
 
Le jeu du pouvoir est évidemment de segmenter, de jouer sur des mesures catégorielles, de faire croire que nous ne sommes face qu'à une contestation des marges, de certaines catégories ou de certains territoires. La réalité est que ce qui se joue sous nos yeux c'est la disparition de ce qu'on appelait jadis de la classe moyenne occidentale. Les néolibéraux qui ont initié ce modèle (mondialisation, métropolisation) et les néokeynésiens du « quoi qu'il en coûte » (qui permettent au modèle de perdurer) jouent main dans la main. Ils accompagnent en douceur cette disparition en feignant de répondre à l'inquiétude par la distribution de chèques ou de quelques dotations sur les territoires.
 
Quelle place donner à l'immigration anarchique, et à la délinquance qui parfois en découle, dans cette inquiétude ?
 
Sur l'insécurité comme sur l'immigration - auxquelles il faut bien évidemment ajouter les thématiques qui s'y rattachent comme l'échec de l'État régalien et la survie de l'État-providence - tout a été dit depuis si longtemps... Sur la question des flux migratoires, par exemple, la démographe Michèle Tribalat a tout écrit il y a plus de trente ans. Contrairement à ce qu'affirment les médias, ces sujets sont parfaitement consensuels dans les milieux populaires, et ce quelles que soient les origines. L'explosion des violences aux personnes et plus généralement la diffusion de la délinquance sur l'ensemble du territoire ont fait voler en éclats un cadre essentiel aux yeux des gens ordinaires, celui de la maîtrise de l'espace public. Les manquements de l'État et l'autisme d'une bourgeoisie progressiste qui surjoue la posture morale (en se protégeant bien sur des effets de l'insécurité et de l'immigration) sont vécus par la majorité ordinaire comme une négation de leur existence. Mais si, sur ces sujets, la brume médiatique et académique est épaisse, elle n'effacera jamais la réalité. C'est ce qu'ont compris les élites scandinaves qui, en quelques années, ont été capables de penser contre elles-mêmes et tout simplement de faire preuve de responsabilités sur ces sujets vitaux. Un sens de la responsabilité collective et du bien commun qui, pour l'heure, reste totalement étranger aux élites.

Référendum de 2005, « gilets jaunes » et même réforme des retraites... une majorité hétéroclite s'agrège dans un front de refus mais elle ne trouve pas de débouché politique positif...

Cette majorité ordinaire présentée par une part du monde médiatique et académique comme une masse anomique composée d'abrutis a effectivement quelques difficultés à imposer son diagnostic à une classe politique « netflixisée » qui considère que la majorité n'existe pas (pas plus que le pays d'ailleurs) et qui désormais bâti ses programmes en ciblant des panels socioculturels. Contrairement à ce qu'on pense, la diabolisation ne vise pas prioritairement ce qu'on appelle « l'extrême droite » . Tout cela n'est que du spectacle. Le principal objet de la diabolisation est de délégitimer le diagnostic solide et rationnel des gens ordinaires ; un diagnostic parfaitement incompatible avec les intérêts des classes supérieures. Cette diabolisation permet au pouvoir de se maintenir sans projet, si ce n'est celui de gérer le chaos. Mais tout cela reste très fragile. Aujourd'hui le narratif dominant ne convainc plus que les bénéficiaires du modèle et une majorité de retraités. La réalité est qu'aujourd'hui la majorité ordinaire est le seul ensemble socioculturel cohérent, le seul socle sur lequel on puisse reconstruire un dessein politique commun. Autonome, sûre d'elle-même, affranchie du clivage gauche-droite et de la tutelle des syndicats ou des partis, la majorité ordinaire, c'est-à-dire la société elle-même, est engagée dans un mouvement existentiel. Ce n'est pas seulement son pouvoir d'achat qui est en jeu mais son être. Il ne manque qu'une étincelle pour qu'elle s'exprime dans la rue ou dans les urnes. Ce n'est qu'une question de temps.

Beaucoup de Français sont comme atteints de Covid long, expliquent Jérémie Peltier et Jérôme Fourquet dans une note récente. On voit la gauche se diviser entre gauche du travail et gauche du loisir. N'y a-t-il pas dans le rapport au travail un nouveau point de fracture dans les catégories populaires ?
 
Que le rapport au travail ait évolué c'est une évidence mais comment peut-on considérer, comme le pense la gauche anti-Roussel, que le travail est une valeur dépassée ou pire que les classes populaires n'aspireraient qu'aux loisirs ? Ces représentations sont typiquement celles d'une catégorie sociale totalement déconnectée qui plaque sa réalité sur celle de la majorité ordinaire. Le problème des classes populaires n'est pas de savoir comment on occupe son temps libre. Le problème du temps libre - on peut y inclure la retraite, ou les congés - n'est pas d'en avoir, mais de pouvoir en profiter. Rappelons que près de la moitié des Français ne partent jamais en vacances (une proportion qui augmente dans les milieux modestes) et que les RTT ont surtout été une bénédiction pour les classes supérieures. Entre congés payés et RTT, ces dernières disposent aujourd'hui de beaucoup plus de temps libre que, par exemple, les employés et les ouvriers non qualifiés (trente-trois jours contre vingt-six en moyenne, source : Dares, ministère du Travail 2017). Le télétravail, qui dessine aussi un autre rapport au travail, concerne d'abord ces catégories (60% des télétravailleurs sont des cadres, alors qu'ils ne représentent que 20% des salariés). Nouveau marronnier de la presse, la thématique de la « grande démission » , présentée comme massive, est un luxe que peu de catégories modestes peuvent se permettre. Fabien Roussel a eu raison de rappeler que, dans leur immense majorité, les classes populaires préfèrent le travail au chômage, de vivre des revenus de leur activité aux prestations. Pour compléter le tableau, la majorité ordinaire est aussi présentée comme une masse dont le seul objectif serait de consommer. Pour mémoire, en juin 2022, l'institut Ipsos confirmait que la marge de manœuvre budgétaire des Français n'avait cessé de baisser, et qu'aujourd'hui 58% d'entre eux font leurs courses a` 10 euros près, ou moins... un accès à la société de consommation relatif. Ces représentations émanent de classes urbaines qui baignent dans la surconsommation métropolitaine et qui seraient risibles si, in fine, elles ne masquaient pas l'essentiel. Si le rapport au travail a changé, on le doit d'abord à gens intelligents qui pilotent depuis des décennies la vie politique qui a conduit à la grande désindustrialisation du pays en plongeant des familles entières dans le chômage et les prestations sociales.
Pour résumer, ceux qui fracassent l'outil de production (la part de l'industrie est passée de 24% du PIB en 1980 à 10% en 2019) puis dissertent sur la « fin du travail » ne voient pas que les gens n'aspirent qu'à une chose : avoir un emploi correctement rémunéré.

N'est-ce pas un symptôme supplémentaire d'une société atomisée avec le seul cocon amicalo-familial comme horizon ?

Vous validez indirectement la vision nihiliste qui est celle de Netflix : une société réduite aux panels du marketing. Dans ce schéma, il n'y a plus de société, le marché fait la loi et surtout le pays n'existe plus. C'est peut-être la vision de quelques élites mais cela ne correspond pas à une réalité où les gens restent attachés à leur mode de vie, ce qui induit mécaniquement des solidarités contraintes. Et puis cette représentation d'une société atomisée n'est pas nouvelle. De Gaulle nous parlait déjà de ce pays ingouvernable aux 350 fromages. Sauf qu'à l'époque l'élite, y compris l'énarchie, était attachée à quelque chose qu'on appelait le bien commun et qui était en réalité un attachement à la nation et à ceux qui la constituent. Cet attachement a produit la grande politique industrielle et sociale de l'après-guerre qu'on a appelé le gaullo-communisme, un pur produit de l'élitisme français. On feint de croire que la critique des élites contemporaines est un antiélitisme en soi. Rien n'est moins vrai. Les gens attendent que des élites attachées au bien commun, c'est-à-dire à leur service, leur disent sincèrement « je vous ai compris » , nous nous sommes trompés, nous sommes allés trop loin dans la mondialisation libérale, dans la métropolisation, l'ouverture des frontières et nous allons enfin vous servir.
*Denier ouvrage paru : « Les Dépossédés » , Flammarion, 2022.

L'UE éveille de multiples soupçons

Yann Bizien

Le scandale lié aux ingérences du Maroc et du Qatar au sein des institutions européennes n’a pas encore livré tous ses secrets. Mais il a déjà mis en évidence la fragilité du Parlement et de la Commission vis-à-vis des opérations d’influences étrangères. Les eurodéputés ont pris l’habitude de fonctionner en vase clos, sans contrôle, pour traiter le problème des dérives en lieu sûr, derrière le rideau. Nombre d’entre-eux n’auraient d'ailleurs pas déclaré des petits cadeaux et des voyages offerts par des pays extérieurs à l’Union européenne. L'UE éveille désormais de multiples soupçons. L’ampleur du problème était pourtant connue des plus éclairés. La confiance des peuples européens dans Bruxelles et Strasbourg n’était pas si élevée. Elle est en train de s’effondrer devant la naïveté confondante et la légèreté coupable des mis en cause pour corruption.


L’Éducation nationale empile les réformes comme les mauvaises grippes

H16

La réforme des lycées donne déjà ses fruits et pas de doute, ils sont mûrs, ils sont juteux et pleins de vitamines !

Mise progressivement en place depuis 2018, cette réforme a ainsi abouti depuis l’année dernière à se passer complètement de mathématiques dans son tronc commun à partir des classes de première, ne laissant cette matière que pour les filières scientifiques. Joie, délivrance et décontraction pour une grande quantité d’élèves pour qui les mathématiques n’ont constitué qu’une forme élaborée de torture mentale tout au long de leur cursus scolaire, cette suppression leur a donc permis de se consacrer pleinement à toutes les autres matières (langues, histoire, géographie, français notamment) dont ils allaient faire leur miel lors de leurs études supérieures.

Las : une partie de ces mêmes élèves se retrouve à présent quelque peu déconfite lorsqu’il s’agit de candidater pour les études supérieures de leur choix qui, elles, réclament ou bien un niveau suffisant en mathématiques ou, pire, d’avoir continué cette matière bien au-delà de la classe de seconde. Patatras, les choses deviennent complexes : au moment de s’inscrire sur Parcoursup, certains découvrent l’horrible réalité que l’inscription en faculté d’économie (par exemple) nécessite un niveau en mathématiques qu’ils n’ont plus.

Bien évidemment, ici, on devra s’interroger sur le raisonnement obscur qui s’est mis en place dans la tête de ces élèves pour d’un côté s’inscrire sciemment dans les classes de première et de terminale ne comportant aucune option de mathématiques avec, dans le même temps, la ferme intention de poursuivre leurs études dans des disciplines pour lesquelles les mathématiques, si elles ne constituent pas un pilier fondamental, n’en sont pas moins présentes et indispensables.

Certes, ce niveau d’inconséquence portera à sourire pour des jeunes qui prétendent assez vite à participer à la société et, plus alarmant, frétillent d’aise à la perspective de voter et s’engager politiquement pour certains d’entre eux…

Cependant, ce constat ne devra surtout pas faire oublier que ce pataquès vient s’ajouter aux trop nombreux autres qui s’empilent maintenant depuis des années pour tout ce qui touche l’instruction des enfants français : alors que l’Éducation nationale permettait jusque dans les années 70 de former des individus aptes à s’insérer dans la société, les décennies suivantes ont violemment bénéficié de chacune des lubies du moment, de réformes toutes moins habiles et pertinentes les unes que les autres et la mise en place de systèmes d’orientation qui ont spectaculairement échoué à produire autre chose qu’un désastre.

Il faut ici évoquer l’incompétence fulgurante des ministres et des administrations qu’ils ont, les uns après les autres, fait semblant de cornaquer dans le marais putride dans lequel l’équipage s’est enfoncé depuis des lustres et continue d’y barboter calmement.

Doit-on réellement s’appesantir sur les ratages, maintenant multiples et retentissants, de Parcoursup qui, d’année en année, étonne par sa capacité à inventer des situations toujours plus ubuesques, à laisser sur le carreau des étudiants, à produire des affectations farfelues et à ne pas tenir compte ni des souhaits ni des réalités de terrain ? On pourra arguer que seul un tout petit pourcentage d’élèves se retrouve consciencieusement embrouillé (pour ne pas dire broyé) par ce système mal fichu, mais même un petit pourcentage, sur un grand nombre d’étudiants, cela finit par faire beaucoup.

Et à la fin, c’est toujours trop pour quelque chose qui devrait se passer sans anicroches au point que même le chef de l’État, pourtant pas réputé pour être en prise directe avec la réalité, finisse par admettre que ce truc est une usine à gaz stressante, rejoignant en cela les témoignages (nombreux) de ceux qui ont dû l’expérimenter.


Quant au reste, force est de constater que malgré l’empilement frénétique de réformes, le niveau scolaire des Français ne s’améliore pas, au contraire. Tout se passe comme si la succession de ministres hétéroclites n’avaient absolument pas aidé l’institution à simplement faire son travail, au contraire même. C’est à se demander si les efforts n’ont pas été portés, de façon systématique et avec application, sur à peu près tout sur ce qu’il ne faut pas faire.

Les exégètes des enquêtes de niveau scolaire menées ces dernières décennies multiplient les tergiversations, les euphémismes et les atermoiements pour ne surtout pas regarder la réalité en face et avouer que le Roi est nu, ou qu’il est, au mieux, vêtu de fripes rapiécées : la France n’est plus que l’ombre de ce qu’elle fut il y a 25 ans, et à plus forte raison il y a 50 ou 100 ans.


Tant et si bien que la récente suppression des mathématiques du tronc commun des classes de première et de terminale a provoqué des dégâts déjà visibles, une paire d’années après cette magnifique initiative, au point tel que l’actuel ministricule en charge du Titanic éducationnel français a été obligé de convenir qu’il y avait un souci et qu’il fallait faire marche arrière : dès la rentrée 2023, les mathématiques reviennent dans le tronc commun.

Mhmh enfin, en théorie… Les dissensions se creusent entre la tête du ministère et l’administration, pour laquelle rien n’est réellement acté. Si vous êtes élève en 2023, bonne chance pour savoir ce qui va se passer exactement…

En somme, le bordel incompréhensible qui a présidé à l’instigation d’un Parcoursup finalement mal fichu et encombrant n’a pas été contenu et le voilà qui perfuse maintenant toutes les strates de l’administration scolaire française. Le programme, les options, la nature précise du tronc commun et ce qu’on doit faire ou ne pas faire n’est plus qu’une vaste soupe conditionnelle et floue. Pour tout dire, on dirait les douzaines de pages de protocoles sanitaires que Blanquer et sa fine équipe de malades mentaux ont pondu pendant la crise pandémique en espérant rendre simple le fatras d’injonctions contradictoires qui constituait la position officielle du gouvernement en la matière.

Dans ce bouillon opaque de réformes indéchiffrables ajoutées les unes aux autres, l’élève n’est plus qu’une variable d’ajustement. Et comme de surcroît, tout a été fait pour qu’il ne soit pas de plus en plus autonome et affûté, mais exactement le contraire, on ne parvient qu’à une unique conclusion : ce pays est foutu.