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6 mai 2024

Comprendre le pacte européen sur l’asile et la migration

Maxime Tandonnet


26/4/2024 - Le pacte européen sur l’asile et la migration fait relativement peu parler de lui dans les médias et pourtant, il devrait compter pour l’avenir des Européens. Il vient d’être approuvé par le Parlement européen le 10 avril dernier. Auparavant, il avait été adopté par le Conseil des ministres européens le 20 décembre 2023. Constitué de neuf règlements européens et d’une directive, ce pacte, en négociation depuis des années, est censé apporter une réponse à la crise migratoire de 2015-2016 qui se prolonge. Il doit entrer en vigueur à partir de 2026.

Au bref, quel est son contenu ? Il prévoit un filtrage des migrants irréguliers (300 000 en 2023 selon Frontex) sur tous les points de leur entrée dans l’Union européenne (grands aéroports, frontières terrestres orientales, rives de la Méditerranée…). Des centres d’accueil fermés seraient installés à proximité des points d’entrée. Les migrants présentant une demande d’asile pour être autorisés à entrer en Europe feraient l’objet d’un tri. Ceux dont la demande d’asile a peu de chance d’être acceptée (taux d’acceptation du statut de réfugié concernant les nationaux de leur pays d’origine de moins de 20% dans l’UE) feraient l’objet d’un examen accéléré sur place de leur demande d’asile dans les 12 jours. En cas de rejet de leur demande, ils seraient renvoyés dans leur pays dans un délai de 12 jours. Cette règle ne serait pas applicables aux mineurs non accompagnés, autorisés à entrer dans l’Union européenne. Les autres demandeurs d’asile (plus de 20% de taux d’acceptation par pays d’origine), seraient autorisés à entrer dans l’Union européenne. Leur demande d’asile serait examinée dans le pays par lequel ils sont arrivés – principe maintenu du règlement Dublin III. Mais 30 000 d’entre eux feraient l’objet d’un transfert dans d’autres pays de l’Union pour l’examen de leur demande, selon une clé de partage liée à la population totale. Les pays refusant de les prendre en charge – conformément à la règle du pacte – seraient sanctionnés d’une amende de 20 000 € par demandeur d’asile. En période de crise ou d’afflux massif, les règles changent. Le taux de 20% d’acceptation pour mettre en œuvre la procédure accélérée peut être remonté à 50%. Le nombre de demandeurs d’asile répartis dans toute l’Europe peut excéder les 30 000. etc.

Mon avis ? une impressionnante construction bureaucratique, une sorte de Gosplan fondé non sur des produits industriels et agricoles mais sur des êtres humains qui n’a aucune chance de jamais fonctionner. Tout repose sur la possibilité de renvoyer massivement dans leur pays des demandeurs d’asile déboutés dans un bref délai. Absurde : quand ils ont détruit leurs documents d’identité et refusent de décliner leur identité, voire s’opposent physiquement à leur retour, on n’a jamais su les rapatrier, sauf exceptionnellement selon des procédures d’identification lourdes et aléatoires. L’enfermement dans des centres sur toute la zone frontalière et l’organisation pratique du tri soulève de gigantesques difficultés pratiques face à des centaines de milliers d’arrivés. Et puis la répartition impérative : c’est toujours le même raisonnement, on traite les gens comme des marchandises inertes sans tenir compte du fait que ce sont des personnes qui finiront toujours par se rendre où elles le désirent malgré toutes les escortes et les surveillances policières. Cette logique de la contrainte physique a toujours lamentablement échoué comme le savent tous ceux qui ont travaillé sur le sujet (Convention puis règlements Dublin I, II et III…). La seule issue possible et raisonnable à la crise migratoire est un traitement des demandes en amont, dans les pays d’origine ou de transit, et une répression sans faille des filières esclavagistes qui organisent les transferts par la Méditerranée, accompagnés d’un effort massif européen d’aide au développement. Mais il est tellement plus difficile de choisir et de décider, d’agir dans le concret, que de construire des usines à gaz à force de règlements et de directives !

Valérie Hayer est visiblement nulle

H16

6/5/2024 - C’est le 2 mai qu’avait choisi BFMTV pour nous asséner le premier débat entre Valérie Hayer et Jordan Bardella dans le cadre de la campagne électorale pour les prochaines élections européennes de juin. À cette occasion, la tête de liste des macronistes a affronté pendant deux longues (trop longues) heures son homologue du Rassemblement National ce qui leur a permis d’aborder une flopitude de sujets dont on sait pertinemment qu’ils ne seront pas traités par les institutions européennes de toute façon.

Et pour ceux qui ne se souviendraient pas de Valérie Hayer, rassurons-les : c’est normal. Inconnue d’à peu près tout le monde il y a quelques mois lorsque son nom fut évoqué pour prendre la tête de liste aux européennes, ses contre-performances systématiques ont depuis solidifié sa place dans le ventre mou des sondages, sans vraiment donner l’occasion aux Français de mettre un visage sur ce nom dont, il faut bien le dire, personne n’a rien à carrer.


Sur le fond et comme on pouvait s’y attendre, nous avons pu observer deux socialistes s’écharper sur différents points de l’actualité : les constats d’un côté ou de l’autre sont bien évidemment teintés des biais de leurs parfums politiques, l’un colorant son socialisme d’un léger nationalisme pastel pas trop agressif pendant que l’autre parfume son socialisme interventionniste d’un mondialisme européen favorable à la dissolution moelleuse de l’identité française dans ce dernier. En fait, aucun des deux n’ose même imaginer que le pays puisse, en réalité, complètement se passer des institutions européennes et, vision d’apocalypse rédhibitoire, qu’il puisse choisir la voie opposée au socialisme en diminuant l’empreinte de l’État, de sa bureaucratie obèse et de ses connivences et corruptions multiples.

Bref, c’est – toujours sur le plan du fond – un match nul, vraiment nul, pour les partisans de la liberté et de la responsabilité et il n’y a en réalité absolument aucune surprise à constater cette déroute intellectuelle des politiciens français.

Sur la forme, en revanche, il apparaît de plus en plus clair que Jordan Bardella dispose d’une maîtrise de l’exercice qui, sans être exceptionnelle, le place très au-dessus d’une Valérie Hayer complètement perdue (Valérie hAilleurs ?), empotée dans ses dossiers, qui recourt à des manœuvres rhétoriques et répétées aussi grossières qu’agaçantes, et qui, de façon générale, semble assez mal à l’aise tant avec le principe du débat qu’avec les sujets abordés.

Il faut reconnaître que la tête de liste des macronistes doit relever un défi de taille : tenter de porter un programme politique européen pour un parti et des politiciens passablement usés par les précédentes années, et dont le bilan déjà possible actuellement est absolument catastrophique. Dettes colossales, immigration incontrôlée, insécurité galopante et des indicateurs économiques qui pointent tous vers une crise sans précédent, voilà qui représente déjà un gros boulet de départ, auquel s’ajoute les questions purement européennes pour lesquelles l’évaporation presque totale de l’importance française et sa diplomatie devenue clownesque placent Hayer dans une position à peu près indéfendable.

On doit ajouter à cela son manque total de notoriété et, pire encore, son charisme de responsable des ressources humaines d’une PME dans le Cotentin un jour de pluie, à l’instar de toutes les macronettes qu’on nous présente sur les plateaux télé.

Bref, elle est visiblement nulle.

Cependant, cette visible nullité impose une question : pourquoi Macron l’a-t-il alors désignée pour mener sa liste aux prochaines élections ? Pourquoi une telle erreur de casting ?

Quelques hypothèses méritent d’être évoquées.

Écartons rapidement celle qui voudrait qu’elle se soit retrouvée là quasiment par hasard, ou plutôt parce que les décideurs, Macron en premier, sont aussi perdus qu’elle l’est dans cette campagne : bien qu’envisageable, c’est une hypothèse un peu trop simple pour les esprits tordus qui nous gouvernent. S’ils sont, certes, souvent médiocres, ils n’en sont pas à ce point nuls et la nomination de Hayer à cette place ne tient donc ni de l’incompétence crasse, ni du pur hasard.

En réalité, une première raison probable est qu’il n’y avait, tout simplement, pas bousculade pour prendre la tête de cette liste européenne : on l’a dit, le bilan est très mauvais, les enjeux plus qu’épineux et les débats à venir sentaient le pourri depuis des mois. Les candidats un tant soit peu valables ont bien évidemment fui cette responsabilité piégée. Et même ceux qui étaient déjà en place comme Nathalie Loiseau, vieux briscards politiciens habitués à sauver leur peau, ont senti le danger et pris les mesures nécessaires pour ne pas être en première ligne. Pas fous. Restait donc Hayer, pas assez fûtée pour comprendre le traquenard.


Et ce choix par défaut, que Hayer réfute faiblement, convient finalement pas mal à Macron et sa troupe : s’ils ont bien compris que leur liste européenne risquait de se prendre une branlée de force 9 sur l’échelle électorale, ils ont aussi compris tout l’intérêt de mettre cette candidate en avant. Elle constitue, en pratique, un excellent bouc émissaire, sorte de bouclier niais qui pourra encaisser la défaite, en être officiellement responsable, et épargner l’humiliation à d’autres politiciens plus en vue dans le petit cercle méphitique de Macron. En somme, grâce à Hayer, la déroute macronienne ne sera pas une victoire du Rassemblement national mais la conséquence d’une simple erreur de casting, tout au plus.

Mais surtout, en construisant la liste et la campagne européenne pour cette défaite, si ce n’est en l’appelant de ses vœux mais au moins en la planifiant consciencieusement, Macron peut laisser le champ libre à Bardella et ses nationalistes en carton. Il ne fait guère de doute que ces derniers, pas plus doués que les macronistes pour le pouvoir, devront se dépêtrer des institutions européennes et que, la médiocrité touchant maintenant tous les partis de façon profonde, ils ne feront pas mieux. Il y a même des raisons objectives pour qu’ils fassent moins bien, depuis le manque d’expérience jusqu’à la corruptibilité naturelle des nouveaux élus fraîchement dans la place. Imaginer quelques membres de cette liste mouillés par des affaires sordides dans quelques mois ou quelques années au Parlement européen n’est pas un pari risqué et constituera, pour Macron, un retour sur investissement relativement aisé.

En somme, il apparaît donc que si Valérie Hayer est nulle, ce n’est pas une erreur mais cela pourrait être un choix politicien habile.

Et les Français dans tout ça ? Mais allons, s’ils avaient leur mot à dire, ça se saurait, et si voter servait à quelque chose, ça fait longtemps que ce serait interdit, enfin voyons.


https://h16free.com/2024/05/06/77527-valerie-hayer-est-visiblement-nulle

5 mai 2024

Emmanuel Macron est prêt à "ouvrir le débat" d'une défense européenne comprenant le nucléaire

Georges Kuzmanovic

29/4/2024 - Macron détruit la France. Maintenant, il s'en prend au cœur du régalien. Ce n'est ni plus ni moins que la fin de la France en tant que Nation.
Nous avions donc bien raison, dès 2019, en analysant le Traité d'Aix-la-Chapelle entre la France et l'Allemagne, voulu par Macron, comme le transfert à l'UE :
⇨ de l'arme nucléaire française
⇨ de notre siège permanent au Conseil de sécurité de l'ONU.
Et dans la logique de "son projet", c'est normal : sans ces transferts, la fédéralisation de l'Union européenne que Bruxelles veut est impossible.
Pour occuper le poste de futur "président de l’ Europe", objectif de carrière de Macron, il doit en passer par l’abandon de la souveraineté nationale par le vote à majorité qualifiée.
Or, cette fédéralisation que Macron et les européistes veulent, se fait à bas bruit, hors du contrôle populaire. Point de référendum, mais des "résolutions" du Parlement européen ou de l'Assemblée nationale française, qui pas après pas, détruisent le modèle français.
Si le peuple bouge, le gouvernement maniera le fouet. Cela a clairement été démontré à plusieurs reprises depuis 7 ans : face aux Gilets jaunes, face aux manifestants contre la réforme de la retraite (rejetée par 92% des actifs), etc.
Voilà où nous en sommes.
Au bord d'une véritable révolution négative.
Si le peuple de France ne se réveille pas, s'en sera fini de la France.
La tribune des 50 refusant la fédéralisation de l'Union européenne dont la conséquence sera de défaire la France est maintenant publique et chacun peut la signer.
Faisons du bruit, n'acceptons pas notre défaite.

Défendons la Nation française ⇒ https://referendumue2024.fr

4 mai 2024

L’union des droites ne passera par aucun des partis politiques actuels

Maxime Tandonnet

30/4/2024 - [Ci-dessous une tribune demandée par le JDD sur l’idée « d’union des droites », sur une base historique. Le papier fait réagir, plutôt négativement : ce que j’ai essayé de montrer, c’est que le redressement du pays ne saurait provenir que des Français eux-mêmes et sûrement pas de magouilles entre les partis politiques actuels dans un contexte immensément volatil où dominent l’incrédulité et l’écœurement – en tout cas bien plus incertain que le message exprimé par les sondages.]

Une photographie montrant M. Bardella, Mme Maréchal et M. Bellamy sur une même scène des « Eveilleurs » alimente la rumeur d’une possible « union des droites » ou alliance électorale entre le RN, Reconquête et les Républicains. En additionnant leurs forces et les suffrages tels qu’annoncés par les sondages, une coalition de ces trois partis dépasserait les 40%. Ainsi, l’union des droites seraient-elle la recette « magique » d’un retour de la droite au pouvoir en 2027, après quinze ans de pouvoir socialiste y compris sous sa version macroniste ?

Et d’abord, « l’union des droites » a-t-elle jamais fonctionné dans l’histoire récente ? Sans doute faut-il remonter à la célèbre classification des trois droites françaises conçue par René Rémond : conservatrice et catholique ou légitimiste ; bonapartiste ou nationaliste, étatiste et centralisatrice ; et enfin orléaniste, libérale, décentralisatrice et pro-européenne. Ces critères sont toujours en toile de fond de l’histoire des droites en France, malgré des nuances et des frontières parfois mouvantes. Pendant la Ve République, ils se retrouvent plus ou moins à travers le clivage entre un courant gaulliste ou néo-gaulliste, groupant la droite conservatrice et étatiste (produit de la fusion des deux premières de René Rémond) et le mouvement giscardien, ou issu du giscardisme, libéral aussi bien sur le plan économique que sociétal et pro-européen.

Les succès électoraux de la droite, aux présidentielles comme aux législatives, ont toujours eu pour source l’union électorale de ces deux droites, néo-gaulliste et libérale. Elle a remporté les élections législatives de 1973, 1978, 1986, par exemple, dans le cadre d’accords électoraux. Elle a gagné les présidentielles quand elle s’est retrouvée, au premier tour, ou le cas échéant, au second tour, derrière un candidat unique : 1969, 1974, 1995 et 2007. En revanche, elle s’est effondrée quand elle était divisée, à l’image de 1981.

Faut-il déduire de ces précédents qu’une union des droites d’un nouveau genre entre LR, le RN et Reconquête, permise notamment par la « dédiabolisation » du RN, serait la voie royale d’un retour au pouvoir ? L’analogie avec les heures de gloire de la droite rassemblée vient spontanément à l’esprit. Le parti de Mme le Pen, puissant dans les sondages, semble revendiquer aujourd’hui les idées qui furent jadis portées par le courant néo-gaulliste : centralisme, nationalisme, étatisme. Les Républicains, faibles dans les sondages mais forts de leur ancrage local, reprennent quant à eux l’antienne libérale notamment sur le plan économique ou européen. Alors, n’est-il pas temps d’allier nationalistes/étatistes et libéraux pour réapprendre à gagner ? Beaucoup de militants des deux camps le réclament.

De fait, cette hypothèse, fondée sur la transposition aujourd’hui de schémas de jadis paraît à la fois irréaliste et illusoire. Elle ignore le bouleversement, intervenu notamment depuis les années 2010 mais surtout 2017, de la nature même de la vie politique. Les débats d’idées ou affrontements de projets de société, à l’image des élections de 1974, 1981 et même 2007, malgré ce qu’ils pouvaient avoir de superficiel, ont quasiment disparu. La vie politique est devenue un spectacle médiatique – une sorte de Grand-Guignol – autour de quelques gourous. Son objectif essentiel n’est plus de convaincre par des arguments mais de séduire par des bons mots, des mimiques et des coups de communication. Aujourd’hui, qui a la moindre idée des différences de programme entre les partis politiques ? Non qu’elles soient inexistantes, mais elles s’effacent derrière la logique de séduction. Dès lors, le temps des alliances dans l’objectif de transcender des différences pour faire triompher un projet – puisque les projets ont quasiment disparu – est révolu.

L’émotionnel a remplacé la réflexion sur l’avenir. Les passions de haine ou d’adoration d’un leader se sont substituées à la notion de confiance ou de bien commun. L’affectif a pris la place de l’engagement. Dès lors, comment s’allier avec des personnes qu’on déteste ou qu’on méprise ? La politique se limite désormais, pour l’essentiel à l’allégeance/soumission à un gourou. La supposée « union des droites » telle que certains la rêvent, reviendrait tout simplement, pour ce qu’il reste de la droite LR, à s’agenouiller devant Mme le Pen.

De plus, ce grand spectacle éthéré (hors sol), se déroule sur fond d’incrédulité et d’indifférence des Français envers la chose publique. Les législatives de 2022 ont donné lieu à un taux d’abstention de 54% (record absolu). 53 % des Français se désintéressent de l’élection européenne. 80% d’entre eux, selon le sondage CEVIPOF sur la « confiance », ont une image défavorable de la politique. Alors, une prétendue « union des droites » (coalition LR/RN/R) serait perçue dans l’opinion comme une magouille politicienne à grande échelle, une de plus. L’image de la droite LR est aujourd’hui minée par la défection de plusieurs de ses principaux leaders qui ont rallié la « macronie » – par opportunisme. Un arrangement de ce qu’il reste de la droite LR avec le parti de Mme le Pen ou celui de M. Zemmour, achèverait de plonger ce mouvement dans le discrédit, se traduirait par sa vassalisation et sans doute, sa disparition.

En outre, une manœuvre de ce genre ne garantit même pas une victoire électorale. Certes il est plus ou moins acquis dans les nombreux commentaires de presse, que l’œuvre de « dédiabolisation » de Mme le Pen est une réussite. Pour autant, son personnage comme son parti, demeurent extrêmement clivants dans le pays et rien n’assure, loin de là, qu’ils soient vraiment en mesure de réunir en 2027 les suffrages de 50% de l’électorat lors d’un second tour.

L’idée ou le projet « d’union des droites » tel qu’il est entendu aujourd’hui relève d’une approche à courte vue. Plus encore qu’en 2017, les élections nationales de 2027 s’annoncent comme explosives. Une quasi-certitude : le macronisme est condamné à la disparition en raison de son impopularité et l’interdiction constitutionnelle d’un troisième mandat consécutif. Dans un contexte politique infiniment volatil, impalpable, imprévisible, soumis au maelström des émotions collectives et des manipulations, de nouvelles passions et de nouveaux visages vont émerger (à l’image de ces élections européennes). Les cartes seront rebattues. Le RN qui a tant prospéré comme opposant attitré du macronisme pourrait connaître un revers de fortune du fait de la disparition de celui-ci, et subir à son tour un effet de lassitude. Les frontières partisanes seront de nouveau chamboulées comme en 2017, mais peut-être encore plus violemment.

En 2027, les Français auront le sentiment de sortir d’un tunnel de quinze années dominées par une forme d’esbroufe narcissique comme masque d’un effondrement économique et financier, sécuritaire, social, diplomatique, scolaire et intellectuel… Le gagnant, celui qui parviendra à émerger de ce chaos, par-delà les clivages, pourrait être alors celui qui saura le mieux tourner la page, s’imposer comme l’anti-Jupiter, susceptible d’incarner l’achèvement de cette période délétère et l’entrée dans une ère politique différente. Comment ? En tendant une main de réconciliation au pays, fondée sur le respect intangible du peuple et l’action collective au seul service de ce dernier et du retour de la confiance. C’est alors que la vaste majorité de ceux qui aiment la France, d’où qu’ils viennent, pourrait s’unir en dehors des anciens clivages, sans illusion excessive ou naïveté mais avec détermination.

3 mai 2024

OBSOLESCENCE DU ROBOT MAASTRICHIEN

Gabriel Nerciat


3/5/2024 - Un des débats politiques les plus fascinants que j'aie pu voir depuis longtemps.
On avait l'impression d'assister à une corrida interminable mais assez plaisante, où le taureau de combat était curieusement remplacé par une dinde immobile, pour le plus grand amusement et profit du toréador. Avec une mise à mort déjà accomplie à la moitié du spectacle.
Même moi, au bout de vingt minutes, j'avais pitié de cette pauvre cruche à la fois effrayée et arrogante, qui fuyait pathétiquement le regard de son contradicteur, ne maîtrisait même pas les dossiers techniques qu'elle était censée dominer (notamment sur l'immigration et le CETA), et essayait faute de mieux, pour ralentir l'issue du naufrage, de réchauffer les vieilles méthodes de délateurs antifascistes des années 1980 ou bien se réfugiait dans de pathétiques formules creuses apprises par coeur, qui tombaient anarchiquement dans le poste comme des cheveux artificiels dans une soupe que plus personne ne veut boire.
Cette pauvre fille disgracieuse, stupide, malpolie et maladroite, qui devrait se cacher pour ne pas tomber en dessous de 15% des voix au lieu de persister à faire campagne sur des plateaux de télévision, on croirait qu'elle a été choisie exprès, pour consommer de façon achevée et risible la fin d'une époque ; non seulement celle du règne de Macron mais aussi et surtout celle où des technocrates hautains, dogmatiques et ignares réussissaient encore à en imposer à des populations sans aucun rapport avec ce qu'ils pensent, vivent, ressentent ou disent.
Il y a quelque chose de mécanique dans ce type de personnage, de non-humain, de robotisé, qui donne une idée de ce que devaient être les femmes commissaires politiques dans la défunte Union soviétique - une Ninotschka qui n'arriverait jamais à rire, une androïde qui n'essaie même pas d'imiter la voix des hommes dont elle emprunte les traits.
Même Bardella, garçon assez doué mais plutôt lisse, y gagnait en aisance et en discrète exaspération morale.
Jusqu'à présent, je ne comprenais pas (il y a longtemps que je n'essaie plus de raisonner comme un électeur de gauche) en quoi tenait le succès d'un apparatchik prétentieux et atlantiste comme Glucksmann, mais maintenant je sais : il donne aux anciens électeurs de Macron l'illusion intermittente d'échapper au temps qui passe et à la dérisoire froideur des robots.
Game over, comme disaient les logiciels de jeux informatiques dans ma jeunesse. Mais surtout faute de combattants.

La réelle faisant défaut, l’administration française va tenter l’intelligence artificielle

H16

2/5/2024 - Avec les développements récents de l’intelligence artificielle, il apparaît clair que cette technologie va, progressivement, tous nous toucher d’une façon ou d’une autre : comme le mentionnaient ces colonnes il y a quelques jours, l’intelligence artificielle s’adresse à tous, et c’est tellement vrai que, comprenant la tendance et l’importance de s’inscrire avec elle, l’administration française s’y met à son tour !


Oui, vous avez bien lu : mue par l’une de ces pulsions que seule notre Belle & Grande République du Bisounoursland est capable de produire, la jeunesse pensante de notre gouvernement a décidé de pousser l’intelligence artificielle sur l’ensemble de notre administration qui, à l’évidence n’attendait que ça. Ainsi, lors d’un déplacement à Sceaux dans une maison “France services” – ce guichet unique regroupant fisc, poste, Pôle emploi et CPAM autre débit d’argent des autres – le premier ministre Attal s’est fendu d’une déclaration pour annoncer la création d’une intelligence artificielle “à la française”.

Selon le premier ministre, cette nouveauté technologique sobrement baptisée Albert sera déployée dans la plupart de nos services publics, propulsant la France dans un chapitre neuf de ce XXIème siècle pourtant encore jeune, celui où le pays sera le premier à disposer d’une telle technologie “100% souveraine”. Le fait qu’aucun autre pays, y compris même les plus puissants, ne se soit pas déjà lancés dans cette aventure ne semble pas refroidir l’actuel locataire de Matignon : la France sera la première à mettre vigoureusement et courageusement le doigt dans l’engrenage de la technologie souveraine d’intelligence bureaucratique artificielle, dont l’évocation seule déclenche des frissons de plaisir chez tous nos ministres.

On notera l’utilisation du prénom “Albert” pour l’IA, à la fois bien français et peut-être choisi pour rappeler une sorte de majordome qu’on pourrait ainsi convoquer pour régler ses petits soucis avec l’administration et sa bureaucratie aussi compréhensive que ses procédures sont simples et souples pour s’adapter aux exigences du terrain.

D’ailleurs, le frétillant Attal a précisé en quoi cette nouveauté allait changer le quotidien des cobayes administrés français : il s’agit essentiellement d’obtenir des procédures plus simples et plus rapides, tant pour les gens devant les guichets que pour ceux derrière, qui pourront, l’assure le Premier Ministre, se recentrer sur le contact relationnel, dont on sait qu’ils sont tous absolument friands.


À titre d’exemple, Attal explique qu’Albert permettra à l’administration fiscale de rédiger des “pré-réponses” aux usagers lorsqu’ils viendront tenter de comprendre pourquoi, subitement, ils ont été ponctionnés trois fois ou qu’on leur a taxé à nouveau un héritage qu’ils ont pourtant déjà déclaré il y a trois ans, ou pourquoi on leur réclame une taxe foncière sur un bien qu’ils ont vendu cinq ans plus tôt, etc. On attend avec gourmandises les pré-réponses à des questions sur des contrôles fiscaux farfelus : Albert promet déjà des prouesses.

De la même façon, on imagine déjà l’aide qu’une telle IA pourra fournir, depuis la liste des démarches détaillées pour obtenir toutes les subventions même les plus cachées, jusqu’aux moyens légaux et argumentés pour réduire ses cotisations ou ses taxes dans différents domaines. Nul doute que les administrations seront au taquet pour garantir de telles performances, hein.

De façon générale, ce nouveau gadget bond technologique dans les administrations ressemble à s’y méprendre aux propositions déjà formulées par nul autre que notre Bruneau de Bercy concernant moult simplifications qu’il entend mener pour aider tout le monde et son chat.


Du reste, on a une idée assez précise de ce que va donner cette initiative.

D’une part, le passé de l’État français en matière d’informatique à la sauce publique suffit à se rassurer : Louvois (la paie des militaires), Numergy ou Cloudwatt (le “cloud souverain”), l’ONP (paie du personnel public), Genesis (Justice), Faeton et la numérisation des cartes grises ou des permis de conduire, Salto, j’en passe et des pires, tout l’historique de l’informatisation des administrations est maintenant truffé de ces pépites majeures que les Français regardent à présent, les yeux humides d’émotion et de gratitude, et que le monde entier nous envie évidemment. Dans ce contexte, l’avenir d’Albert est déjà assuré.

D’autre part, on a la preuve que l’intelligence artificielle fait des miracles puisqu’elle est déjà employée dans l’administration fiscale. Eh oui, l’institution pionnière qui a lancé l’usage de cette technologie dans l’administration française, rappelez-vous, ce fut le fisc avec son utilisation pour repérer les piscines non déclarées.

Une fois mis en place, l’administration n’avait pas hésité à fanfaronner de façon peu prudente : 140.000 piscines avaient ainsi été débusquées par la puissance de calcul des ordinateurs de Bercy et la finesse de l’intelligence artificielle mise en place. Les Français n’avaient plus qu’à bien se tenir, les photos satellites et l’IA les ont à l’œil.

Cela a d’ailleurs tellement bien marché qu’on a rapidement envisagé d’étendre cette pratique à d’autres domaines comme les cabanes de jardin (combien de fortunes ont ainsi été cachées aux services de Bercy derrière ces anodines constructions, combien de nababs des potagers se dissimulent derrière ces cahutes faussement modestes ?)…

Malheureusement, quelques mois sont passés et l’analyse a posteriori et loin des caméras et des micros appelle à plus de sobriété. En substance, les piscines n’en sont pas toutes et l’IA de Bercy fait un peu trop de zèle : une fois sur trois, elle trouve une piscine là où il n’y en a pas.


Enfin, dans un pays où les Français se plaignent chaque jour plus que leur administration est déshumanisée et hors sol, que ses procédures de moins en moins empreintes de bon sens écrabouillent toujours plus les individus dans la machine bureaucratique, dans un pays où l’administration semble chaque jour s’éloigner un peu plus des citoyens, des contribuables et des individus qu’elle est censée servir, Attal – qui a décidément tout compris – propose donc d’ajouter à cette relation déjà distendue un nouvel intermédiaire… Sous la forme d’un outil informatique qui plus est, avec le passif de l’État en la matière.

Forcément, cela va très bien se passer.


2 mai 2024

Marc Amblard

1/5/2024 - Des décennies durant, nous avons cru que la seconde guerre mondiale avait définitivement tiré un trait sur le fascisme. Mort et enfoui dans les décombres de l'histoire. En fait, il ne faisait que sommeiller. Depuis quelques années, il refait surface. Notamment à travers la censure. On vous a fait croire qu'il fallait craindre l'extrême droite pour mieux vous fourvoyer et vous enfumer. Rappelez-vous, chaque fois qu'on prétend faire le bien contre votre gré, chaque fois qu'on prétend limiter les libertés pour plus de justice ou pour votre santé, c'est qu'il n'est pas très loin...