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2 avril 2025

EUROPE : BIDOUILLAGES ÉLECTORAUX

Jean-Claude Delhez

-2/4/2025- Connaissez-vous l'entrefilet ? C'est un petit article de journal, quelques lignes seulement, exilé loin, en bas de page. Il contient une information secondaire, d'un médiocre intérêt, qu'on ne souhaite pas développer. C'est donc au sein d'un entrefilet que j'ai trouvé la nouvelle suivante : « Le parlement estonien a donné hier son feu vert à un projet interdisant aux citoyens non-européens de participer aux élections locales, une mesure qui vise en particulier la forte minorité russe ». Ce projet entend retirer le droit de vote à 80.000 habitants de nationalité russe.
Que font ces Russes en Estonie ? C'est le moment d'éclairer une situation que tout le monde ne maîtrise pas. L'Estonie est un État balte, au même titre que la Lettonie et la Lituanie. Ces trois petits pays du nord-est de l'Europe bordent la mer Baltique (d'où leur nom) et sont frontaliers de la Russie. Ils sont membres de l'Union européenne comme de l'OTAN. Dans chacun de ces pays vit une nombreuse minorité russophone : plus d'un million de personnes au total. Certains de ces Russes vivent là depuis toujours, à la frontière avec la Russie, d'autres sont venus à l'époque de l'Union soviétique puisque les pays baltes faisaient partie de l'URSS jusqu'en 1991.
Parmi ces russophones, certains ont la nationalité balte, d'autres sont demeurés russes. Ce sont ces derniers que l'Estonie veut exclure des élections locales (sachant qu'ils sont déjà exclus des autres scrutins). Cette mesure succède à une autre, prise l'an dernier, dans le pays voisin, la Lettonie. En 2024, la Lettonie a imposé à ses habitants russophones un examen de langue lettone. Qui ne le réussit pas est menacé d'être expulsé de chez lui et envoyé en Russie.
Il est à noter que les minorités russophones des États baltes n'ont jamais créé de problèmes dans leurs pays respectifs. Il est à noter aussi que l'écrasante majorité de ces gens sont natifs des États baltes, n'ont jamais vécu ailleurs, y ont leur travail, leur famille et, pour une partie d'entre eux, peuplent depuis toujours les régions orientales de ces États.
Nous voici en présence de pays de l'Union européenne qui adoptent des mesures discriminatoires à l'encontre d'un pan important de leur population, en sorte de leur ôter leurs droits politiques ou de les chasser de chez eux. Pourquoi ? Parce que le russe est leur langue maternelle.
C'est un exemple parmi d'autres des manœuvres européennes à l'encontre des droits politiques des populations, sous ce même prétexte de russophobie. Ainsi l'Europe a-t-elle soutenu dernièrement l'élection présidentielle en Moldavie qui a permis, de justesse, la victoire de la candidate pro-européenne. Comment ce résultat a-t-il été possible ? En empêchant la grande majorité des citoyens moldaves résidant en Russie (plusieurs centaines de milliers) de voter. L'hiver dernier, l'Union européenne a fait pression pendant des mois sur la Géorgie, en vue de faire tomber le gouvernement de ce pays du Caucase Pourquoi ? Parce que Bruxelles jugeait ce gouvernement trop favorable à la Russie. Elle n'en est pas à son coup d'essai. L'un d'entre vous a relayé, il y a quelques jours, un article intéressant sur les opérations spéciales dans cette région. Parmi elles, l'emploi de la Géorgie, il y a pas mal d'années, par l'Occident, comme pays de transit pour livrer secrètement des armes jusqu'en Tchétchénie, afin d'y alimenter la guerre contre la Russie. Un autre d'entre vous s'est exprimé dernièrement sur un autre pays de l'est de l'Europe, la Roumanie, expliquant que la France s'immiscait dans les élections locales en intervenant auprès de la cour constitutionnelle roumaine.
J'attire votre attention sur un dernier point. Les médias occidentaux regorgent de discours affirmant, depuis plusieurs années, la manipulation des élections européennes par la Russie. Jusqu'ici, malgré ce flot d'informations, je n'ai jamais vu comment se concrétisait cette supposée influence russe sur les élections, sur la constitution des pouvoirs politiques en Europe (qui sont plus russophobes les uns que les autres). Dans le même temps, les manipulations électorales européennes dans l'est du continent sont tenues sous silence ou réduites à l'entrefilet.

28 décembre 2024

Eric Vial

- 28/12/2024 - Tous les empires tombent un jour ou l’autre.
Ce qui vient de se passer en Roumanie, l’annulation des élections présidentielles à deux jours du second tour et alors que le candidat anti-européen et anti-OTAN était donné vainqueur à près de 60 % dans les sondages, ne peut qu’interpeller et questionner.
Les leaders européens montent presque tous au créneau en expliquant « qu’il y a eu des ingérences extérieures », sans aucune preuve factuelle et en oubliant un peu vite qu’ils s’ingèrent eux-mêmes dans des débats qui ne devraient pas les concerner puisqu’ils ne sont pas roumains. Ils condamnent aux autres ce qu’ils font, quel paradoxe.
Il résulte le sentiment d’une démocratie gâchée qui rappelle que les intérêts des empires ont toujours prévalu sur la souveraineté des États qui la composent.
De la même manière que dans les anciens empires austro-hongrois ou soviétique, les États européens semblent aujourd’hui bénéficier d’une large autonomie tant qu’ils respectent « l’ordre établi » ; mais il n’est pas possible de sortir du cadre ou d’avoir une stratégie déviante du pouvoir central.
Désormais, chaque élection démocratique est soumise à des débats sur sa légitimité : cela devient étouffant et suscite du doute : Géorgie, Moldavie, Slovaquie et même États-Unis ou Italie ; Il faut que les résultats aillent dans le sens d’un intérêt commun prédéfini sinon c’est le risque de sanctions ou de menaces guerrières. Mais quelle maladie touche donc le vote populaire et la démocratie dans le monde ? Partout les élections sont de plus en plus contestées.
Le caractère rédhibitoire des résultats semble faire oublier un principe de la démocratie : une élection se perd puis se gagne, ou inversement. Le pouvoir n’est confié que pour un temps. C’est cela la force de la démocratie : la capacité dans la paix de changer ses mandants, ses lois, et ses visions pour un groupe donné.
Respecter ce principe c’est avoir foi en l’avenir et accepter que la souveraineté appartient d’abord au peuple, aux gens.
Dès lors, peut-on être certain qu’en imposant aux peuples une doctrine, sous prétexte de perdre son influence à l’échelle mondiale, on ne les précipite pas dans la rébellion en promouvant du même coup des théories obscurantistes. L’histoire a déjà connu cela.
L’idée de l’Europe, garante de la paix, régulatrice du vivre-ensemble est formidable. Elle peut s’appuyer sur ses valeurs démocratiques originelles pour l’emporter et s’imposer.
Pas certain qu’en agissant comme un empire elle ne trébuche pas à la fin.