Jean Mizrahi
-3/5/2025- Je ne connais pas la famille d’Aboubakar Cissé. Mais je devine sans trop de risque qu’elle ne maîtrise ni les arcanes du droit, ni les labyrinthes de la politique française. Et voilà qu’on la prend par la main, qu’on l’encadre, qu’on la briefe. Direction : la grande machine à fabriquer de l’indignation, le barnum du militantisme victimaire. Elle va devenir une cause. Une photo, un slogan, une marche blanche sponsorisée par LFI, quelques cris dans un mégaphone, et surtout, surtout : un hashtag.
Il ne s’agit pas ici de vérité, encore moins de justice. Il s’agit de stratégie. De récupération. On souffle à l’oreille des proches qu’il y a peut-être quelque chose à gagner : un peu de lumière, un peu d’argent, une forme de reconnaissance médiatique déguisée en combat moral. On leur promet qu’ils peuvent devenir les nouveaux Traoré. Peu importe que le profil d’Aboubakar semble à mille lieues du parcours d’Adama. Peu importe qu’il n’y ait, jusqu’à preuve du contraire, aucune motivation idéologique derrière sa mort. La réalité n’est plus qu’un décor. Ce qui compte, c’est le récit. Et le récit est déjà prêt.
Dans les coulisses, c’est toujours le même attelage : les islamo-gauchistes, les trotskystes recyclés en agitateurs postcoloniaux, les professionnels de la colère télégénique. Cette alliance improbable de barbus identitaires et de post-adolescents en keffieh. Ils n’ont ni honte, ni mesure. Juste une obsession : faire plier la République, accuser l’État, repeindre chaque fait divers en drame raciste structuré. Peu importe les faits, la nuance, ou la décence. Le mort devient matière première, la douleur devient carburant, la famille devient pancarte.
Ce complexe gauchisto-islamiste me révulse. Pas seulement parce qu’il ment, mais parce qu’il salit. Il salit les morts, il salit les luttes légitimes, il salit les principes qu’il prétend défendre. Il transforme chaque malheur en opportunité. C’est une politique du cadavre utile.
Et Aboubakar Cissé ? Il va disparaître, comme les autres, une fois le bruit retombé. Il sera digéré par la machine, puis remplacé. Un nom de plus dans la grande fresque de l’instrumentalisation. Tragique. Cynique. Répugnant.