Translate

Affichage des articles dont le libellé est ISRAEL/PALESTINE. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est ISRAEL/PALESTINE. Afficher tous les articles

19 octobre 2025

Philippe Pernot / Reporterre
10/10/2025

Guerre à Gaza : la stratégie israélienne de la terre brûlée


Israël et le Hamas sont parvenus, le 9 octobre, à un accord de cessez-le-feu à Gaza. Reporterre revient sur la stratégie israélienne de la terre brûlée, qui a détruit plus de 3 000 km² au Proche-Orient depuis 1948.

 Beyrouth (Liban), correspondance 

Les armes vont-elles enfin se taire ? Le 9 octobre, Israël et le Hamas ont conclu un accord, qui prévoit notamment la libération des otages israéliens et des prisonniers palestiniens, ainsi que l’entrée d’aide humanitaire à Gaza — même s’il est trop tôt pour parler de paix. Ces deux années de conflit meurtrier ont semé la dévastation — 68 000 personnes ont été tuées par l’armée israélienne, selon le ministère de la Santé de Gaza. Mais l’armée israélienne a aussi détruit les moyens de subsistance et l’environnement des populations palestiniennes, suivant une stratégie connue depuis des millénaires : celle de la terre brûlée.

De la Grèce antique à Napoléon, au Vietnam comme pendant la colonisation des Amériques, l’environnement et l’agriculture ont souvent fait les frais de ce qui y est maintenant condamné comme un crime de guerre dans le droit international. Le principe est simple : détruire tout ce qui pourrait permettre à une force ennemie de survivre — l’anéantissement par la faim, la misère et la dévastation.

Une stratégie qu’Israël a appliquée méthodiquement depuis sa création en 1948, affectant les écosystèmes de toute la région du Bilad al-Sham (le Levant et Proche-Orient sont des termes coloniaux). Au total, selon les décomptes de Reporterre, en se basant sur des sources historiques et modernes, plus de 3 000 km² de terres arables auraient été incendiées, détruites, bulldozées : soit la moitié de la Palestine actuelle.

Surfaces brûlées et/ou détruites en fonction des années. © Philippe Pernot / Reporterre

Les destructions écocidaires infligées à Gaza en sont l’exemple récent le plus marquant. « À Gaza, Israël applique la stratégie de la terre brûlée pour y rendre la vie impossible : tout y est démoli, pour en faire une ville fantôme, sans aucun moyen de subsistance. Le but est de nous anéantir, même quand les bombardements cesseront », déclare le docteur Ahmed Hilles, directeur de l’Institut national pour l’environnement et le développement à Gaza et maître de conférences à l’université Al-Azhar, au département des sciences de l’eau et de l’environnement. Réfugié en Égypte depuis avril 2024, il dirige à distance de nombreux projets humanitaires liés à l’eau, l’environnement et la pollution.

Dans l’enclave palestinienne, les chiffres sont sans appel : 80 % des terres arables détruites, 97 % des vergers réduits en cendres, un demi-million de personnes au stade le plus avancé de famine — en plus du nombre vertigineux de morts (au moins 68 000 personnes), de blessés (plus de 167 000 personnes), de déplacés (plus de 1,9 million).

« Il s’agit d’un véritable “écogénocide” : il n’y a pas que les bombes, mais aussi la pollution, les maladies, tous ces facteurs environnementaux qui tuent des Gazaouis, dit-il. En deux ans, les Israéliens ont détruit ce que nous avons construit pendant des centaines d’années, voire des millénaires. »

Colonisation de la nature

Un siècle avant la création de l’État d’Israël, l’Empire britannique avait imaginé un plan axé sur l’agriculture et la terre pour coloniser la Palestine, indique Mazin Qumsiyeh, directeur du Musée d’histoire naturelle à Bethléem et de l’Institut palestinien de la biodiversité et de la durabilité.

Cette obsession a alimenté le nettoyage ethnique de la Palestine lors de la Nakba de 1948 : entre 400 et 600 villes et villages palestiniens furent dépeuplés, 700 000 Palestiniens contraints à l’exil, leurs maisons et vergers détruits.

« Comme dans tout processus colonial, il fallait déraciner les habitants et les écosystèmes : alors, les Israéliens ont remplacé les figuiers et oliviers par des pins européens », explique Mazin Qumsiyeh, qui lutte pour préserver la faune et la flore locale : plusieurs espèces mythiques comme les léopards, les guépards et les hiboux-pêcheurs ont disparu après la Nakba.

Des vignes soufflées par un bombardement israélien dans la vallée de la Bekaa, au Liban, le 11 octobre 2024. © Philippe Pernot / Reporterre

Son musée bénévole, à Bethléem, est cerné de 250 checkpoints, d’innombrables colonies israéliennes qui s’étendent illégalement en Cisjordanie occupée, quitte à la réduire à un archipel de localités palestiniennes isolées les unes des autres.

« Même si la situation actuelle en Cisjordanie est très différente de Gaza, je suis convaincu que le même destin nous attend : l’anéantissement et l’enfermement dans des ghettos, des réserves, car c’est la logique de tout projet colonial, des Amériques à l’Australie », dit Mazin Qumsiyeh.

Au total, 78 % des terres palestiniennes ont été conquises en 1948, et du reste, les deux tiers de la Cisjordanie restante sont sous contrôle israélien. Démolitions administratives [2] menées par l’armée et attaques de colons ont détruit 9 600 hectares de terres agricoles et 10 000 oliviers depuis le 7 octobre 2023, en plus des terrains annexés ou abandonnés en Cisjordanie.

Deux bergers palestiniens contrôlés par des colons et des forces d’occupation israéliennes à Masafer Yatta, en Cisjordanie occupée, le 10 mars 2024. © Philippe Pernot / Reporterre

Ceinture de feu

La même stratégie se déploie partout au cours de l’histoire récente du Bilad al-Sham. « Au Liban-Sud, la terre a été convoitée depuis les origines du mouvement sioniste juif, déjà à l’époque ottomane », explique Zaynab Nemr, chercheuse environnementale travaillant entre l’Université américaine de Beyrouth et l’ONG Dalla, dirigée par des femmes au Liban-Sud. C’est ainsi que dès 1923, sept villages agricoles libanais ont été transférés au futur État hébreu, puis dépeuplés et démolis en 1948, leurs raisins, vergers, oliviers détruits.

Puis, lors de la guerre civile libanaise, Israël a envahi le Liban à plusieurs reprises et occupé le sud du pays de 1982 à 2000 – dans le but de lutter contre la résistance palestinienne de l’OLP, mais aussi d’accaparer des ressources longtemps convoitées. « L’occupation a laissé une marque profonde et durable sur l’environnement et la vie agricole de la région : l’État d’Israël s’est systématiquement approprié, a pollué et contrôlé les ressources naturelles — notamment l’eau et les terres agricoles fertiles », explique-t-elle.

Le centre-ville de Nabatieh (Sud-Liban), détruit après des bombardements israéliens, le 7 novembre 2024. © Philippe Pernot / Reporterre

Le tout selon un schéma déjà bien rodé. « Dans le Liban-Sud occupé, les Israéliens ont érigé un système similaire à celui en Cisjordanie : ils ont contrôlé les déplacements des agriculteurs, mais sont aussi devenus les maîtres du temps, en décidant de la durée des récoltes », soutient Zaynab Nemr. Entre 1982 et 2000, des dizaines de milliers d’hectares de terre arable et d’arbres fruitiers avaient été détruits.
Écocide

Les destructions environnementales ne se sont pas arrêtées là. Lors de la guerre de 2006, le bombardement de la centrale électrique de Jiyeh a mené à la plus grande marée noire de l’histoire de la région.

Après le 7 octobre 2023, alors que l’armée israélienne et le Hezbollah se sont affrontés dans une escalade qui a mené à une invasion terrestre israélienne, le 23 septembre 2024, la nature a de nouveau été prise pour cible. Bombardements, dynamitages, bulldozage, incendies, phosphore blanc : c’est par le feu que l’État hébreu a créé une « zone tampon » ravagée à sa frontière, détruisant 37 villages et réduisant 10 000 hectares de terres agricoles, forêts et vergers en cendres. 40 000 oliviers auraient brûlé dans cette région agricole qui fait la fierté de ses habitants.

Des obus israéliens ramassés dans des champs à Kfar Kila, au Sud-Liban, le 25 mars 2025. © Philippe Pernot / Reporterre

« En commettant cet écocide, Israël a voulu rompre le lien entre le peuple et la terre. Il s’agit de cibler intentionnellement la nature comme arme : brûler les arbres, empoisonner le sol et vider les villages », témoigne Zaynab Nemr, qui a cartographié les terres brûlées et mène des projets de réhabilitation par l’agroécologie.

Si l’écocide est régional, la résistance l’est aussi. Et nombre d’activistes et d’agriculteurs luttent pour préserver ce qui reste, de la Palestine au Liban, en Jordanie et en Syrie. Car c’est là-bas, dans ce pays tout juste délivré du joug du dictateur Bachar al-Assad, que les forces israéliennes ont envahi une bande frontalière de 400 km², y démolissant des champs, des puits, et en créant une nouvelle zone d’occupation censée être temporaire. L’avenir nous le dira.

https://reporterre.net/Comment-Israel-manie-la-strategie-de-la-terre-brulee

7 octobre 2025

Sarah Knafo

-7/10/2025- Deux ans après le 7 octobre, les États occidentaux devraient comprendre que nous subissons une menace commune : le djihad. Et tout faire pour protéger nos peuples.
Au lieu de cela, ils se sont radicalisés en faveur de la Palestine et on n’a jamais vu flotter autant de drapeaux palestiniens dans nos rues.
Pourquoi ? Car des chefs d’État cyniques et lâches, comme Emmanuel Macron, se sont soumis à la rue arabe.
Cliquer sur l'image ↴

4 octobre 2025

LE WEEK-END FATAL DE DONALD TRUMP ET SON DESTIN

Gabriel Nerciat

-4/10/2025- Le plus important, dans ce qui va se passer demain ou les jours qui viennent au Levant arabe, n'est pas de savoir si Donald Trump sera ou non le prochain récipiendaire du prix Nobel de la paix, mais qui, des États-Unis ou d'Israël, est encore un État souverain capable de résister à l'hégémonie de l'autre.
En acceptant la restitution des derniers otages juifs contre la libération de plusieurs centaines de prisonniers palestiniens condamnés à la perpétuité (dont sans doute Marwan Barghouti, la figure emblématique des deux Intifadas), le Hamas renverse sur Netanyahou la pression qui depuis des mois était exercée sur lui, et d'une manière ou d'une autre va accentuer celle de l'Arabie saoudite, de l'Egypte et du Qatar sur Trump pour tordre définitivement le bras de son vassal génocidaire – lequel a déjà dû, à la Maison-Blanche, présenter des excuses publiques et humiliantes à l'émir de Doha dont il a bombardé impudemment le territoire en pure perte.
Quelque chose me dit toutefois que Donald ne doit pas être à la joie en ce moment.
Il sait qu'il risque dans cette affaire, en cas d'échec ou de refus humiliant de la part de Bibi – bien plus que dans l'affaire ukrainienne dont il a toujours estimé qu'elle lui avait été imposée par Biden et Zelensky –, une défaite diplomatique autrement plus grave que la non réception d'un hochet scandinave.
Pour trois raisons, dont on peine à distinguer laquelle serait la plus dommageable pour lui.
La première est que s'il cède à Netanyahou en l'autorisant à poursuivre sa guerre génocidaire, il reconnaît implicitement qu'il s'est révélé incapable de résister à l'emprise de l'État profond washingtonien, dont l'actuel pouvoir israélien est un rouage essentiel.
La seconde est qu'il s'aliènera durablement l'hostilité des alliés arabes ou sunnites de l'Amérique, provoquant ainsi la ruine des accords d'Abraham qui avaient été la seule grande victoire diplomatique de son premier mandat (tout en étant à l'origine de l'attaque palestinienne du 7 octobre).
La troisième est qu'il mécontentera à nouveau, après le bombardement de la centrale nucléaire iranienne de Fordo et les suites de l'affaire Epstein (auxquelles Bibi, d'après Tucker Carlson, n'est pas du tout étranger), sa base MAGA, de plus en plus massivement hostile à Israël et au sionisme comme l'avait illustré, entre autres choses, l'évolution de Charlie Kirk dans les derniers mois de sa vie.
En revanche, bien sûr, si Netanyahou cède, voire est contraint d'abandonner le pouvoir, Donald rafle la mise, qui lui rapportera bien plus qu'un prix Nobel (dont je suis persuadé qu'en réalité il se moque bien).
Car la dernière chose dont l'Amérique soit encore vraiment capable est d'imposer à ses anciens alliés, criminels ou serviles, la marque au fer rouge de son ressentiment post-impérial et isolationniste.
Le reste n'a plus grande importance, car aux États-Unis comme peut-être aussi en Israël d'après Elie Barnavi, ce sont surtout les risques de guerre civile et intérieure qui pointent désormais.

23 septembre 2025

Gabriel Nerciat
22/9/2025

LE SIONISME JUGÉ PAR CHARLES DE GAULLE

Qu'on écoute l'ensemble de la conférence : non seulement elle est prophétique, mais au-delà de l'algarade célèbre sur le peuple d'élite dominateur, elle va beaucoup plus loin que Macron aujourd'hui.

Vidéo de 14 min 53 s ↴

5 septembre 2025

1 septembre 2025

Chroniques du fascisme déjà là : Aymeric Caron dans le viseur

Régis de Castelnau
1/9/2025


Aymeric Caron m’épate.

Voilà quelqu’un qu’il m’a été donné de croiser deux ou trois fois (il ne doit pas s’en souvenir), me permettant de constater qu’il était à la fois sympathique et cohérent dans ses prises de positions animalistes. Lesquelles positions me paraissaient peut-être insuffisantes pour justifier une élection à l’Assemblée nationale. Eh bien j’avais tort.

Depuis octobre 2023 il a mis intelligence et énergie au service de la lutte contre ce qu’Israël inflige au peuple palestinien. Comme moi, il considère que l’on est en présence d’un génocide. Et dans ce combat, avec un incontestable courage, il affronte à la fois les militants acharnés de la cause israélienne et les relais dont ils disposent dans les institutions. Et il affiche cette fermeté depuis maintenant près de deux ans, s’exposant ainsi quotidiennement aux pressions, manœuvres, insultes et quolibets de ceux pour lesquels le massacre de 20 000 enfants est tout à fait justifiable. Il existe dans le langage populaire une expression pour qualifier l’absence de courage d’une personne : « je ne partirai pas à la guerre avec lui ». Eh bien en ce qui me concerne j’y partirai en confiance avec Aymeric Caron.

Les soutiens de ce que fait Israël à Gaza sont bien décidés à le faire taire. Fort heureusement, outre sa rigueur, il est aussi protégé par son statut de parlementaire. Grace à l’immunité qu’il procure, prévue pour protéger les élus du peuple des empiétements du pouvoir exécutif. Mais cela n’a pas découragé ses adversaires et il est aujourd’hui confronté à une procédure judiciaire destinée à le bâillonner. Et une fois de plus la justice démontre que sur certains sujets, elle a complètement jeté son impartialité par-dessus bord. Apparaissant une fois de plus comme un des éléments essentiels de la fascisation rampante du système macronien.

Aymeric Caron vient de publier un tweet sur X, et je propose d’en reprendre les termes et de les commenter.

« Il y a un an environ j’ai fait un tweet pour dénoncer le soutien d’Europe 1 au génocide en cours à Gaza, avec des intervenants multiples qui tous s’en prenaient à la demande d’Emmanuel Macron d’un cessez-le-feu.
J’ai donc comparé Europe 1 à Radio 1000 collines, radio tristement célèbre pour avoir encouragé et soutenu le génocide au Rwanda. »


Effectivement, quiconque connaît un peu l’histoire du génocide des Tutsis au Rwanda sait le rôle criminel de cette radio. C’est donc bien, et de façon lapidaire, une comparaison entre le rôle de ce média et celui que joue (pour Aymeric Caron), Europe numéro 1. Pour cette dernière c’est évidemment une imputation lourde, qu’elle aurait pu éventuellement considérer comme injurieuse. Mais le formalisme de la loi sur la presse et la jurisprudence sur les limites du débat politique, l’on fort normalement dissuadée. Et elle s’est bien gardée de le faire. Alors, les amis de Netanyahou ont pensé à une astuce. Qui permette de contourner ces deux obstacles. Voyons comment.

« Rachel Khan, soutien actif du génocide des Palestiniens, figurait dans le tweet d’Europe 1 que j’ai relayé puisqu’elle est l’une de ces voix pro-génocide. Encouragée par l’avocate pro-Netanyahou Muriel Ouaknine Melki, collègue de la chaîne pro-Netanyahou CNews, Kahn décide de porter plainte pour injure raciste. Pourquoi, alors que mon tweet parle d’une radio (laquelle n’a évidemment pas porté plainte) ? Parce qu’elle est sur la photo et que c’est sa citation qui illustre la position d’Europe1 ».

La voilà l’astuce. Normalement tout ce qui relève de l’exercice de la liberté d’expression et de la répression de ses éventuels abus relève de « la loi de 1881 sur la presse » au formalisme protecteur du droit garanti par l’article 11 de la déclaration française des Droits de l’Homme et du Citoyen. Sauf que la haine de cette liberté et la passion répressive du système ont permis d’inventer des infractions qui utilisent le racisme et la discrimination comme circonstance spécifique et aggravante. Alors on va utiliser la couleur de peau de Rachel Khan (?) pour prétendre que c’est elle et non pas Europe 1 qui a été mise en cause, et que c’était une injure raciste (!).

C’est tout à fait grossier, cela nécessite la complicité de l’appareil judiciaire, mais pourquoi se gêner ? Si on se rappelle le zèle déployé après la honteuse circulaire Dupond-Moretti sur « l’apologie du terrorisme », qui a vu des centaines de condamnations… mais dans un seul sens.

« La plainte est surréaliste, pourtant je vais être convoqué par la police avant l’été, pour répondre de mon tweet – c’est une obligation légale lorsqu’une plainte est déposée pour injure aggravée. Je suis obligé d’annuler le matin même le premier rendez-vous que j’avais accepté pour cause de maladie : l’officier de police demande à mon avocat que je fournisse un certificat médical, ce que nous refusons bien sûr. Nous comprenons que nous aurons le droit à un traitement particulier. »

Cette demande de justification par certificat médical de la part d’un officier de police est simplement sidérante ! Pour qui se prend-il ? Un député est protégé par son immunité et c’est lui qui décide s’il vient et quand il vient à une convocation de police. Sauf si ce flic zélé obtient une mainlevée de l’immunité parlementaire prononcée par le bureau de l’Assemblée nationale sur la demande d’un juge. Et nous verrons dans la description que fait Aymeric Caron de l’entretien, à laquelle s’ajoutent tous les témoignages de ceux qui y ont eu affaire, le service de police spécialisé créé pour la mise en œuvre de cette répression de la liberté d’expression, fonctionne de manière totalement partiale.

« Nous décalons le rdv et je me rends à la seconde convocation de la police il y a quelques mois. Je vais alors répondre pendant près de deux heures à des questions plus qu’étranges. Le policier me demande par exemple pourquoi j’ai posté un tweet le jour où j’ai décalé le premier rdv avec lui, alors que j’étais malade. Je suis ensuite interrogé longuement sur ma connaissance du génocide du Rwanda et sur ses différents acteurs. En revanche pas une seule question sur Rachel Khan. Pas une. »

Les commentaires sont inutiles. Sauf peut-être concernant la connaissance du génocide du Rwanda. Histoire de fournir au procureur la possibilité d’un réquisitoire supplétif pour contestation de crimes contre l’humanité ?

« Il y a quelques jours, mon avocat apprend que suite à mon audition par la police, le procureur adjoint de Nanterre, Jean-Pascal Oualid, a décidé de me poursuivre. Qui est Jean-Pascal Oualid ? Pour le savoir il suffit d’aller sur son compte LinkedIn. On découvre qu’il reposte Caroline Yadan, qu’il dénonce l’emploi du mot « génocide » pour qualifier les massacres de Gaza, qu’il s’en prend aux étudiants de Sciences Po qui dénoncent le génocide, qu’il déteste LFI et Blanche Gardin ou encore qu’il louange Richard Malka. »

De nouveau, on bascule dans la sidération. Que signifie l’intervention d’un procureur militant déclaré d’une cause directement politique. Sa mission n’est-elle pas celle d’une autorité de poursuite qui agit au nom de la République, dans la défense des intérêts de celle-ci, sous l’autorité hiérarchique du pouvoir exécutif français légitime ? Et sûrement pas pour le compte du gouvernement d’un État étranger.

Et le devoir de réserve alors ? Celui prévu par l’Ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature et précisé par « La Charte de déontologie des magistrats » selon laquelle : « Le devoir de réserve impose au magistrat de faire preuve de retenue dans l’expression publique de ses opinions, de manière à ne pas nuire à l’image d’impartialité, d’indépendance et de dignité de l’institution judiciaire. » Toutes les interventions sur les réseaux sociaux, citées par Aymeric Caron sont autant de violations du devoir de réserve. Mais bien sûr dans le système macronien on sait très bien qu’elles ne subiront pas la moindre remontrance. Pas plus que ne va en encourir Rachel Khan pour son appel à « une solution finale pour le palestinisme », formule génocidaire tout à fait élégante qui ne provoquera évidemment aucun froncement de sourcils ni du parquet ni de l’ARCOM. Doit-on comprendre que dans la France macronienne, comme pour l’opposition aux massacres de Gaza entraîne l’accusation immédiate d’antisémitisme, la couleur de peau de Madame Khan est un totem d’immunité qui lui permet de proférer des horreurs ?

« Évidemment tout cela est parfaitement cousu de fil blanc. Depuis près de deux ans les pro-génocide cherchent une brèche pour m’atteindre. Il fallait les alliés, il fallait inventer le motif, ça y est la combine est en route. Mon avocat et moi avons hâte de ce procès. Nous aurons beaucoup, beaucoup de choses à raconter et de témoins à convoquer. »

Aymeric Caron repart au combat.

Respect.

25 août 2025


Logique génocidaire d’Israël : arracher les arbres pour déporter les hommes

Régis de Castelnau
25/8/2025


La destruction de l’arbre planté en mémoire d’Ilan Halimi, victime d’un assassinat antisémite est une infamie. À laquelle il est normal de réagir en la dénonçant pour ce qu’elle est.

Mais curieusement (ou pas), les aboyeurs qui se sont emparés de cette information et l’utilisent pour justifier leur soutien à ce que fait Israël en Palestine, restent depuis toujours obstinément muets sur la destruction de centaines de milliers d’oliviers appartenant aux Palestiniens de Cisjordanie. Dans une région conquise militairement par Israël, illégalement occupée depuis près de 60 ans, colonisée par des fanatiques qui se livrent à des pogroms meurtriers quotidiens, l’armée israélienne (vous savez la plus morale du monde) protège ces infamies meurtrières quand elle ne les pratique pas directement.


Le bilan depuis 1967 est effarant.

Selon les chiffres des organisations israéliennes de défense des droits de l’homme, près de 900 000 oliviers ont été détruits. À l’évidence pour une bonne raison parce qu’au-delà du symbole national pour les Palestiniens, ces arbres étaient un pilier économique pour cette population. La cadence de destruction s’est considérablement aggravée ces dernières années et en particulier entre octobre 2023 et fin 2024, plus de 52 300 arbres ont été détruits.

Les destructions se déroulent surtout lors des saisons de récolte (octobre-novembre), où colons et autorités militaires entravent ou violentent les agriculteurs, détruisant les arbres ou leur récolte. Avec la volonté affirmée de priver les habitants de cette ressource. Nouvelle preuve de la volonté d’épuration ethnique constitutive de la politique de génocide.

Vous n’entendrez JAMAIS les Degois, Fourest, Enthoven, Naulleau, Quatremer, Dray etc, etc… tous les vaillants souteneurs du génocide, dire un mot sur cet arbitraire violent qui dure depuis près de 50 ans et que subissent quotidiennement les Palestiniens de Cisjordanie.

Et ce silence n’a qu’une seule raison : affichant sans vergogne leur laideur morale, ils soutiennent ces infamies. S’en rendant ainsi les complices.

23 août 2025

Quitter et venger Gaza

Nour Elassy / Mediapart
21/7/2025

La journaliste et poétesse palestinienne Nour Elassy vient d’être évacuée de Gaza. Dans sa nouvelle chronique écrite à Paris, elle raconte la douleur extrême de quitter les siens ainsi que son périple jusqu’à la France. Elle fait une promesse : venger Gaza.

« J’écris ceci depuis Paris, avec sa pluie de juillet qui arrose doucement mes joues. Comme si elle s’excusait pour moi de la douleur que je ressens. Comme si elle pouvait sentir à quel point je suis fragile, après avoir quitté tout mon monde pour poursuivre mon rêve.
Les jours précédant l’évacuation ont été les plus sanglants que nous ayons jamais vus. Le ciel brûlait plus fort. La terre s’est fissurée plus profondément. Le nombre de bombardements, d’ordres d’évacuation et de massacres a dépassé ce que l’on peut compter.
Le consulat français a déclaré qu’il était temps d’évacuer, pas parce que c’était sûr, mais parce qu’Israël avait finalement donné son autorisation, et nous avons déménagé à Deir al-Balah pour attendre le départ.
Je n’ai pas dormi. J’ai regardé ma famille respirer, mémorisant les voix des miens comme si elles allaient disparaître. Parce qu’elles allaient disparaître.
J’ai quitté Gaza sans rien d’autre que les vêtements que je porte, ma carte d’identité et la douleur insupportable de savoir que ma mère et ma petite sœur, tout mon monde, resteraient derrière, dans une guerre conçue pour nous effacer.
Les discussions sur un cessez-le-feu imminent et les grands espoirs de mettre fin à cette guerre m’ont rendue un peu plus calme, mais aujourd’hui, ces mensonges sont gelés. C’est un spectacle récurrent, et nous tombons dans le panneau à chaque fois. Non pas parce que nous sommes idiots, mais parce que nous sommes désespérés.
Le consulat de France nous a dit quelques jours avant : « Préparez-vous, si vous voulez toujours partir. » Pour poursuivre mes études, j’ai été admise à étudier les sciences politiques à l’EHESS (l’École des hautes études en sciences sociales) à Paris.
Mais comment préparer ses bagages pour l'exil ? Comment plier ses souvenirs dans un sac à dos que l’on n’a pas le droit de porter ?

Les cils de ma sœur, le regard de ma mère

La nuit précédant mon départ, j’ai essayé de mémoriser les cils de ma sœur. J’ai dormi entre elle et ma mère, toutes enlacées comme si c’était la dernière fois. Une grande partie de moi et d’elles voulait tellement le nier. Elle était silencieuse. Trop silencieuse. Ce genre de silence terrifiant que font les enfants lorsqu’ils en savent plus que ce que vous voulez qu’ils sachent. Elle ne m'a pas dit : « Ne pars pas ». Elle m’a juste regardée et m’a serrée encore plus fort dans ses bras. Et ce regard me suivra plus longtemps que cette guerre.
Quant à ma mère, je n’ai pas la force d’écrire cela : je ne peux pas oublier son regard et la façon dont elle a pleuré de tout son cœur en me poussant hors de la pièce pour partir.
Je suis partie comme une voleuse, non pas en volant, mais en laissant derrière moi tout ce que j’aimais.
Nous avons attendu à Deir al-Balah, où nous avons été forcés d’évacuer ; on nous a dit que le Sud était plus sûr. Au point de rencontre convenu par le consulat, nous nous sommes regroupés avec d’autres personnes choisies pour cette évacuation humanitaire. Trente d’entre nous, peut-être plus.
Je n’ai même pas été autorisée à emporter le carnet de poésie que j’avais rempli pendant la guerre, celui que ma sœur m’avait offert.
Chacun d’entre nous porte des histoires qu’il n’aura jamais fini d’écrire. Nous sommes montés dans les bus comme des fantômes portant des corps, chacun avec des yeux pleurant, bouffis de n’avoir pas dormi, plus tristes et plus confus les uns que les autres.
Je me suis assise près de la fenêtre et je me suis forcée à regarder, à assister à la mort de ce qui était ma maison. Khan Younès. Rafah. Ou ce qui était Khan Younès, Rafah. Tout avait disparu. Aplati dans une architecture de silence. Des os en béton. Du linge brûlé. Même les oiseaux volaient plus bas, comme s’ils étaient en deuil.

Les camions bloqués là

Je n’ai pas de mots pour décrire l’ampleur de la destruction – et la méconnaissance que j’en avais – sur la route menant à la frontière de Kerem Shalom-Abu Salem. Je n’en croyais pas mes yeux, on aurait dit un film sur la fin du monde, mais ce n’était pas le cas.
Puis nous sommes passés devant les camions, les camions d’aide humanitaire. Alignés comme des accessoires sur une scène de crime. Il y en avait des dizaines. Remplis de nourriture. De farine. D’eau. Parqués à quelques mètres du cadavre de Gaza, ils n’ont jamais été autorisés à y pénétrer. Le pain pourrit pendant que les enfants dans les tentes font bouillir de l’herbe pour le dîner.
Comment appelez-vous cela, si ce n’est un crime de guerre ? Ce n’est pas un siège. C’est la famine en tant que politique étrangère. C’est le meurtre par la paperasserie, signée à Washington, appliquée à Tel-Aviv et dont l’Europe est témoin.
Nous avons atteint le poste de contrôle. Après avoir vérifié nos identités, les soldats israéliens nous ont attendus, fusil à la main, comme si nous étions la menace et non les victimes. Ils nous ont dit : « N’apportez rien. » Pas d’ordinateurs portables. Pas de livres. Pas même des écouteurs.
Je n’ai même pas été autorisée à emporter le carnet de poésie que j’avais rempli pendant la guerre, celui que ma sœur m’avait offert pour mon anniversaire. Les mots, apparemment, sont trop dangereux pour l’occupant.
Ils nous ont fouillés comme si nous portions des bombes ; pas de chagrin. Ils ont touché notre dos, vérifié nos chaussettes, scruté nos yeux. Un soldat, si c’est ainsi que l’on peut décrire un criminel, a regardé un étudiant qui voyageait avec nous et a commencé à l’interroger sur l’endroit où il vit et sur ses connaissances.
L’équipe du consulat a vérifié nos noms à nouveau et a été si gentille et chaleureuse. Elle nous a donné de la nourriture et nous a informés que leur équipe de l’ambassade de France nous attendrait à notre arrivée en Jordanie.

Une femme évacuée

Dans le bus pour la Jordanie, personne ne parlait. Mais le chagrin a son propre langage. Notre silence était un hymne. Un chant funèbre pour les familles que nous avons quittées. Pour les enfants que nous ne reverrons peut-être jamais. Pour la vérité qu’il nous était interdit de porter.
Deux sièges derrière moi, une fille a chuchoté. Elle ne m’a pas demandé mon nom. Je n’ai jamais demandé le sien, mais elle a dit : « Mon père est resté. Il a dit qu’il préférait mourir dans sa maison que dans une tente. Mon petit frère a 5 ans, je lui ai dit que je ramènerais du chocolat de France, il a souri. Il ne sait pas que c’est peut-être un adieu pour toujours. »
Elle a tiré ses manches sur ses mains, a regardé le sol et a murmuré : « J’ai l’impression d’avoir laissé mon âme sous les décombres. Et maintenant, j’ai peur que quelqu’un marche dessus. » Mais une phrase me hante encore aujourd’hui. Lorsqu’elle m’a dit : « Je suis convaincue que je retournerai chez ma mère et que je lui expliquerai mon voyage, et qu’elle me dira : “Bonjour, ma fille, tu es en retard !” »
Pas de pleurs. Pas de sanglots. Juste le silence, et un silence si lourd qu’il pressait nos poumons. Comme moi, cette fille est quelque part en France maintenant. Mangeant du pain. Elle étudie le français, le droit ou une autre science. Mais une partie d’elle, une partie de nous tous, est toujours à Gaza, criant derrière un mur effondré que personne n’arrive à percer.

La découverte de la Palestine

Nous sommes passés dans les territoires palestiniens occupés. Quatre heures à travers une terre que je n’avais jamais vue. Parce que nous sommes de Gaza. Nous n’avons jamais vu notre propre terre. Le reste de la Palestine nous a toujours été interdit.
Et pourtant, c’était là : des montagnes. Des vignes. Des collines couvertes d’oliviers. La mer Morte et, enfin, les stations balnéaires. Les hôtels cinq-étoiles, les Européens qui bronzent en bikini alors qu’à trente kilomètres de là, des enfants sont enterrés à plusieurs sous une tente.
C’est le théâtre cruel de l’occupation : génocide en Méditerranée, cocktails dans la mer Morte.
Nous avons été installés dans un hôtel à Amman, à l’InterContinental Jordan, un hôtel magnifique, dont tous les frais étaient couverts par la France. Il y avait tout ce dont on pouvait avoir besoin, mais jamais ce que l’on voulait.
Chaque nuit, je fixe le plafond et me demande : les ai-je trahis ? Ai-je abandonné ma mère, ma sœur, mon peuple ?
Nous y avons passé deux nuits, du mercredi 9 au vendredi 11 juillet à l’aube. Ce furent deux jours entiers de silence et de solitude dans une chambre d’hôtel très luxueuse. Nous avons été conduits de l’hôtel à l’aéroport, avec beaucoup d’attente et de vérifications, pour finalement être mis dans un vol pour Paris.
Le voyage était tellement bouleversant. C’était la première fois que je prenais l’avion. J’ai été très malade tout en m’émerveillant de l’immensité du monde. Et de la manière dont un minuscule morceau de terre a permis au monde entier de se réveiller et de comprendre à quel point il se trompait.
Nous avons atterri à l’aéroport Charles-de-Gaulle. Nous avons été contrôlés une nouvelle fois et nous avons obtenu un visa d’étudiant. Mes grands amis m’attendaient avec les plus belles fleurs et une accolade très chaleureuse.
Me voilà à Paris désormais. En sécurité. Je dors dans un lit chaud très confortable. Et chaque nuit, je fixe le plafond et me demande : les ai-je trahis ? Ai-je abandonné ma mère, ma sœur, mon peuple ?
La culpabilité me brûle l’estomac et m’empêche de garder quoi que ce soit à l’intérieur, que ce soit de la nourriture ou des larmes. Partir était-il un acte de courage ou de désertion ? Mais je sais ceci : je n’ai pas quitté Gaza pour l’oublier. Je l’ai quittée pour la venger avec la langue, avec la politique, avec une mémoire plus vive que les balles.
Je suis partie pour apprendre la langue des tribunaux qui ne nous ont jamais sauvés. Pour utiliser leurs propres outils afin de graver notre nom dans l’histoire.
Vous, dans vos ambassades, vos salles de rédaction et vos studios de télévision, vous entendrez parler de moi. Je ne serai pas votre histoire à succès, je serai votre miroir. Et vous n’aimerez pas ce que vous y verrez.
J’ai quitté Gaza sans rien. Pas de sac. Pas de livres. Pas de cadeau d’adieu. Seulement de la rage. »

Ce texte a été confié à Rachida El Azzouzi, qui l’a traduit de l’anglais.
Nour Elassy est journaliste, écrivaine et poétesse.
L’écriture, dit-elle, la sauve. Peu après le 7 Octobre, elle a commencé à écrire des poèmes qu’elle a rendus publics, notamment sur le réseau social Instagram.
Âgée de 22 ans, elle a étudié la littérature anglaise et française. Elle est née et a grandi dans la bande de Gaza, dans le quartier d’Al Tofah, dans le nord-est du territoire.
Pendant plus de quinze mois, Nour Elassy a été déplacée avec sa famille à Deir al-Balah, dans la partie centrale de la bande de Gaza. Revenue en février 2025 dans le nord de Gaza, elle a été de nouveau déplacée avec sa famille début avril.
Elle se trouvait dans la ville de Gaza quand elle a appris qu’elle était l’une des trente-sept personnes, aux côtés notamment de notre autre chroniqueur, le journaliste et traducteur Ibrahim Badra, que les autorités françaises évacuaient le 9 juillet de l’enclave palestinienne. Elle est arrivée à Paris le 11 juillet.
Depuis des mois, une mobilisation, portée notamment par l’écrivain palestinien Karim Kattan et le rédacteur en chef de la revue The Funambulist, se déployait en France pour que Nour Elassy soit mise à l’abri des bombes israéliennes et intègre l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), à Paris, pour y suivre un master en science politique.

13 août 2025

Monique Plaza

« Ce n’est pas le doute, c’est la certitude qui rend fou. » (Nietzsche)
« Le doute est le commencement de la sagesse. » (Aristote)
« Le doute est le premier pas vers la liberté. » (Boris Cyrulnik)

Le débat sur la situation en Israël/Palestine devient de plus en plus conflictuel au fur et à mesure que la situation s’aggrave et que les propagandes s’intensifient.
Je ne peux avoir de cette situation une idée claire et nette. Plus je lis de textes, d’opinions, d’analyses, plus je suis troublée, plus je doute. Je ne sais pas comment font ceux qui ont un avis tranché devant une telle complexité et des contradictions aussi profondes.
Ce qui surnage dans cet océan d’incertitudes et de doutes, c’est mon rejet du Hamas et de la politique de Netanyahou, la perception de la montée d’un islamisme menaçant dans le monde, l’exigence d’une approche humaniste en toutes circonstances – des éléments qui entrent en contradiction les uns avec les autres.
Ceux qui sont convaincus d’avoir tout compris et de détenir la vérité me heurtent par leur propension au soupçon, à l’agressivité, au jugement, parfois au mépris et à l’injure.
Nous nous prenons le chou sur Israël pendant que notre pays se délite, entraîné sans frein dans les convulsions d’un monde chaotique, dont les dirigeants officiels et officieux sont en grande majorité des êtres médiocres, corrompus, psychopathes, autocrates … à l’image des va-t-en guerre de l’UE ou de l’OTAN, tentés de mettre le feu aux poudres, mus par une irrésistible pulsion de mort souvent alimentée par une addiction à la came.
Le monde est sens dessus dessous. Ce n’est pas nouveau, mais nous mesurons l’ampleur du désastre avec acuité depuis que la toile d’Internet s’est développée, avec ses réseaux sociaux, ses blogs, ses chaînes YouTube, ses intelligences artificielles, qui démultiplient à l’infini les informations et désinformations, nous permettant fort heureusement de ne plus dépendre des seuls médias de connivence. Notre sentiment d’impuissance en est d’autant plus profond, et désespérant. Nous parlons, écrivons, nous disputons, mais au fond nous n’avons guère de prise sur les événements, notre principale activité étant d’y réfléchir et d’en parler.
Cependant, le réflexion et la parole ne sont pas inutiles, loin de là. Elles sont précieuses pour lutter, à l’échelle individuelle et collective, contre ce qui nous opprime et nous empêche de penser en dehors des cadres imposés.
Tel est mon objectif : penser en dehors des cadres imposés en partageant des informations et en pratiquant le doute.

25 juillet 2025

Sarah Knafo

Reconnaître un État palestinien aujourd’hui, est-ce la solution ?

-25/7/2025- Mettons de côté un instant le triste symbole, où moins de deux ans après les atrocités commises par le Hamas le 7 octobre, il se voit offrir la reconnaissance d’un État par un grand pays comme le nôtre. Étudions les conséquences de ce choix.
Un État, c’est un territoire, une autorité politique, une armée. Aujourd’hui, sur quel territoire se situerait cet État palestinien ? Avec quelle armée, sous quel commandement et sous quelle autorité politique ?
Regardons la réalité en face : la population de Gaza a élu le Hamas. En 2024, selon le Palestinian Center for Policy and Survey Research, 60 % des Palestiniens soutenaient encore cette organisation djihadiste, malgré les destructions, malgré le 7 octobre et malgré la guerre.
Il ne s’agit pas d’assimiler définitivement tout un peuple à un groupe terroriste, car un jour sans doute, la population palestinienne s’émancipera de ses bourreaux. Il s’agit de constater qu’au moment où nous parlons, le Hamas s’est enraciné dans une part massive du corps social. Et si vous doutez encore, regardez les félicitations immédiates du Hamas à Emmanuel Macron : ils savent d’avance qu’ils seront les premiers bénéficiaires. Puis demandez-vous pourquoi les pays arabes voisins refusent d’accueillir les réfugiés de Gaza. L’Égypte a été catégorique : pas question d’ouvrir sa frontière. Avec plus d’un Gazaoui sur deux qui soutient le Hamas, l’Egypte, qui a déjà fort à faire avec la menace des Frères musulmans, n’a aucune envie de déstabiliser son équilibre national. Au même moment, en France, des juges nous obligent à accorder à chaque habitant de Gaza l’asile chez nous.
Alors, quel est le problème à offrir aujourd’hui un État qui tombera certainement aux mains du Hamas ? Le problème, c’est que le Hamas ne rêve pas d’écoles, d’infrastructures et de prospérité pour sa population. Un État palestinien ne réglera donc aucun des problèmes humanitaires. Non, le Hamas rêve de raser Israël. C’est écrit noir sur blanc dans sa charte. Article 7 : « Le Hamas aspire à la réalisation de la promesse d’Allah, peu importe le temps que cela prendra. Le Prophète a dit : « L’Heure du Jugement n’adviendra pas tant que les musulmans n’auront pas combattu les Juifs en les tuant, au point que le Juif se cachera derrière les pierres et les arbres, et que les pierres et les arbres diront : Ô musulman, ô serviteur d’Allah, un Juif est derrière moi, viens et tue-le. ». L’article 8 donne le slogan du Hamas : « Le Coran est sa Constitution. Le Djihad est son chemin, et la mort pour Allah est le plus noble de ses souhaits. »
On est loin de la Constitution d’un Etat moderne soucieux de son peuple ! Quelle base de négociation peut-on bâtir là-dessus ? Quel plan de paix peut tenir face à une telle volonté d’anéantissement ? Emmanuel Macron peut-il ignorer tout cela ?
À terme, on ne peut que rêver d’une solution à deux États, où la paix est établie et où chacun peut se concentrer sur le bien-être de sa population et son propre développement. Qui pourrait souhaiter une guerre éternelle avec ses voisins ? Mais il est des moments où des solutions idéales sur le papier sont impraticables dans la vraie vie.
Emmanuel Macron ne fait donc que s’agenouiller devant une illusion diplomatique. Il le fait sans doute par calcul, par cynisme, par narcissisme. Quelles que soient ses raisons, on ne fait pas la paix avec un mouvement qui a pour objectif votre disparition. On ne fonde pas un État sur le sang des innocents. Et on ne récompense pas le djihad par un siège à l’ONU.

21 juillet 2025

Gaza : en fonction de celui qui la prononce, "l’apologie" n’est pas "l’apologie"

Régis de Castelnau
21/7/2025

Rubrique : apologie

Coucou les amis magistrats, ça va ? Ou plutôt « j’espère que vous allez bien » comme on dit aujourd’hui. Il n’y a plus de canicule pour l’instant, pas besoin d’aller à la piscine, vous devriez être d’attaque.
Eh bien dites donc, voilà la vidéo d’un gars qui est manifestement français et qui dirige une association. Quand on l’écoute, c’est infractions pénales à tous les étages.
Comment dites-vous ? Vous ne vous rappelez pas ce que raconte la loi française ? On ne vous l’a pas appris à l’ENM ? C’est bizarre, parce que quand il s’est agi de poursuivre « l’apologie du terrorisme » après le 7 octobre, vous avez déployé un zèle admirable.
Alors comme j’ai bon cœur, je vais vous rappeler l’article 211-2 du Code pénal : « La provocation publique et directe, par tous moyens, à commettre un génocide est punie de la réclusion criminelle à perpétuité si cette provocation a été suivie d'effet. Si la provocation n'a pas été suivie d'effet, les faits sont punis de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 € d'amende. »
Ça mériterait peut-être une petite enquête préliminaire ? Parce qu’il s’agit quand même d’un crime justiciable de la Cour d’assises.
Et puis il y a l’article 24 Loi du 29 juillet 1881 : « Seront punis de la même peine ceux qui, par l'un des moyens énoncés en l'article 23, auront fait l'apologie des crimes visés au premier alinéa, des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité ». Et celui-là vous ne pouvez pas dire que vous ne connaissez pas, vous l’avez utilisé plus de 600 fois après le 7 octobre pour exécuter les ordres de Dupond-Moretti.
Bon, malheureusement mon mauvais esprit reprend le dessus, et j’ai la conviction que vous ne bougerez pas.
Lorsque la tragédie aura pris fin, que sera enfin terminé le massacre que tout le monde aura vu, viendra le temps où on demandera des comptes d’abord à ceux qui auront commis des crimes bien sûr, mais aussi à ceux qui ont laissé faire en regardant ailleurs.
Mais peut-être avez-vous raison, une solide bonne conscience doit permettre de supporter le déshonneur. Et l’amour-propre est une affaire personnelle.

Cliquer sur l'image ↴

15 juillet 2025

Régis de Castelnau

Rubrique : impasse

-7/7/2025- Depuis plus d’un an et demi, nous avons dû assister à des horreurs, entendre des horreurs, et voir l’Occident non seulement tolérer un massacre de civils et d’enfants, que le droit international qualifie irréfutablement de génocide, mais encore le soutenir politiquement financièrement et matériellement.
Comment cette catastrophe qui est loin d’avoir produit tous ses effets a-t-elle pu se produire ?
La légitimité du projet sioniste conçu au XIXe siècle, s’est nourrie en Occident après la Seconde Guerre mondiale, du complexe de culpabilité de l’Holocauste, immense crime européen s’il en était. Cette légitimité est aujourd’hui anéantie.
Justifier qu’Israël a le droit de se défendre… en commettant un génocide est absolument impossible. Et s’imaginer que cela puisse être oublié ou pardonné est tout aussi impossible.
Avant d’être la construction d’un refuge pour les survivants de l’holocauste, le projet sioniste était d’abord un projet colonial de peuplement, visant à remplacer un peuple installé sur cette terre de façon immémoriale, par un autre issu d’autres régions du monde et désireux de cette terre pour des raisons religieuses.
Finalement Israël n’a pas échappé à ce qui fut d’abord une malédiction pour les Palestiniens, mais il l’est probablement aussi devenu pour ceux qui avaient cru en la possibilité d’un peuple israélien. La « guerre des 12 jours », qui ne peut s’analyser que comme une défaite d’Israël, vient de démontrer sa vulnérabilité géographique, militaire, économique et politique. Politique parce les habitants occidentaux de ce bout d’Occident n’ont pas montré à cette occasion leur volonté de rester à tout prix.
Au contraire du peuple palestinien qui depuis plus de 80 ans, malgré toutes les souffrances et les sacrifices incroyables, refuse de quitter sa terre.
Ces deux clichés expriment cette volonté inébranlable. À celui penché sur sa terre et qui en recueille les fruits, Israël ne peut opposer que le fusil. Comme face à l’intensité du regard de cette femme, sa seule ressource est la force des soldats qui ne la feront pas plier.
Étonnant comment des photos peuvent exprimer à ce point une totalité. Ce que celles-ci racontent, c’est l’impasse du projet de Théodore Herzl.

11 juillet 2025

"Israël veut bâtir le camp de concentration le plus moral au monde"

Kuzmanovic Georges
11/7/2025

C’est le titre choc d’un éditorial provocateur du journal israélien Haaretz, en référence au slogan souvent repris selon lequel Tsahal serait « l’armée la plus morale du monde » – un concept difficile à concilier avec les massacres de civils.

Mais derrière cette provocation se cache une réalité insupportable.
Israël planifie la création d’un « camp humanitaire » à Rafah, dans la bande de Gaza.
Le but ?
Y regrouper des centaines de milliers de Palestiniens
Dans une zone strictement contrôlée
Avec des frontières fermées et sans libre circulation.
Présentée comme une initiative "humanitaire" – voire "morale" – cette opération est, selon Haaretz, en réalité assimilable à un camp de concentration moderne.
L’objectif réel est de pousser les habitants de Gaza à partir, en les enfermant dans des conditions de vie encore plus insupportables.
Cette stratégie s’inscrit dans un processus de déportation déguisée, qualifiée hypocritement de « départ volontaire ».
Orwell n’aurait pas dit mieux...
L’idée sordide est de rendre la vie invivable pour forcer à l’exil.
C’est, très exactement, une opération de nettoyage ethnique.
C’est une faillite morale sans précédent.
Sous couvert de bienveillance, se prépare une déportation massive et une ingénierie démographique en totale contradiction avec le droit international humanitaire.
C’est aussi une trahison des valeurs juives fondamentales.
C’est une insulte à la mémoire de tous les Juifs qui ont souffert la Shoah.
Ce serait, selon les mots de l’avocat israélien Michael Sfard, un nouveau crime contre l’humanité.
La mise en œuvre de ce projet – déjà en cours – signerait la destruction morale d’Israël sur la scène internationale, faisant de lui l’incarnation d’un État raciste, d’apartheid et criminel.
Cette faillite morale touche aussi l’ensemble de l’Occident.
Les États-Unis – Biden, Trump, démocrates ou républicains, même posture – non seulement ferment les yeux, mais soutiennent logistiquement et politiquement ce nettoyage ethnique.
L’Union européenne, et en particulier Ursula von der Leyen à Bruxelles, oscille entre un silence gêné et une complicité tacite.
Il aurait suffi à certains d’assister au sommet des BRICS à Rio, ou simplement de voyager dans les pays du Sud global, pour comprendre à quel point l’Occident a perdu de sa légitimité morale.
La cause palestinienne y est devenue un puissant facteur d’unité et de mobilisation.
La perception de qui défend le "bien" et où est le "camp de la morale" est en train de basculer à un niveau global.

22 juin 2025

PENDANT CE TEMPS-LÀ, À GAZA

Jean-Claude Delhez

-22/6/2025- Jean-Louis Bourlanges, politicien français, faisait remarquer avant-hier la rouerie de Benjamin Netanyahou : il a lancé son attaque contre l'Iran au moment où USA et Iran négociaient un accord, ce qui a mis fin à cette négociation ; au moment où on allait débattre en Occident de la reconnaissance de la Palestine, ce qui a mis fin au débat ; et au moment où le gouvernement Netanyahou était menacé par l'opposition politique.
Ajoutons-y un ultime avantage pour le dirigeant israélien : les mains libres à Gaza pendant que l'attention mondiale se focalise sur l'Iran. Si l'on s'intéresse à ce petit bout de terre, on se rend compte que, chaque jour depuis l'attaque contre l'Iran, les civils tombent comme des mouches à Gaza. Et ils tombent dans des circonstances qui sont toujours les mêmes : une pseudo fondation humanitaire fondée par les administrations Netanyahou et Trump appelle les civils à des distributions de vivres et, une fois ces civils venus, ils sont la cible de tirs qui en abattent plusieurs dizaines chaque jour, parfois plus d'une centaine de morts. Et, à chaque fois, l'armée israélienne contactée refuse de commenter la chose.
On est donc en présence d'une organisation méthodique du massacre, en plusieurs étapes : 1) On affame les civils en les bloquant dans un territoire sans ravitaillement 2) On leur propose des vivres 3) On profite qu'ils s'approchent en vue de trouver à manger pour les tuer.
Ca m'évoque des souvenirs historiques, une méthode en plusieurs étapes. 1) On demande d'abord à des civils de se faire recenser par l'administration et de porter un signe distinctif sur leurs vêtements 2) Ensuite, on les invite à se rassembler dans un lieu public 3) On leur offre un voyage vers l'est, en train, et la suite est connue. Il existe une variante plus expéditive consistant à leur confier une pelle pour leur demander de creuser un trou d'une certaine profondeur, pelle dont ils n'auront plus besoin quelques instants plus tard.
Tout cela n'empêche nullement les pouvoirs européens, de la politique, des médias et des affaires, de poursuivre leur fructueuse collaboration avec le régime politique qui se comporte de la sorte.

19 juin 2025

Kuzmanovic Georges
19/6/2025

Un missile iranien a frappé et partiellement endommagé l’hôpital Soroka de Beer Sheva. Il y a de nombreuses victimes civiles.
C’est un crime de guerre.
Tout comme les attaques répétées sur les hôpitaux palestiniens.
Sur les 36 hôpitaux existants à Gaza en octobre 2023, seuls 17 restent partiellement fonctionnels en juin 2025.
19 hôpitaux sont totalement hors service – soit détruits, soit gravement endommagés.
Selon l’OMS, entre le 7 octobre 2023 et septembre 2024, 492 attaques ont ciblé des établissements de santé à Gaza. Depuis, la situation est si critique qu’elle n’est même plus comptabilisée.
85 % des centres de santé de la bande de Gaza sont affectés.
Le système hospitalier est en état d’effondrement total, avec des conséquences humaines dramatiques : soins interrompus, maternités à l’arrêt, patients privés de dialyse, de chimiothérapie ou de chirurgie urgente – aggravé par les pénuries de carburant, de médicaments, d’eau et d’électricité.
Après l’attaque de Beer Sheva, Netanyahu s’est empressé de visiter l’hôpital et a promis de « faire payer un lourd tribut aux tyrans de Téhéran »…
Mais alors, quel prix les Gazaouis devraient-ils faire payer au gouvernement d’extrême droite israélien, responsable de la destruction systématique de leur système de santé ?
Netanyahu s'offusque, mais il récolte les conséquences d'une guerre qu’il a lui-même déclenchée et dont le prix fort est payé principalement par des civils israéliens et iraniens.
L’hôpital Soroka n’aurait jamais dû être visé.
Et pas plus que les hôpitaux Al-Shifa, Al-Nasser ou Kamal Adwan à Gaza.
Le droit humanitaire n’a pas de géométrie variable. Les hôpitaux sont des lieux protégés, quels que soient le pays ou le drapeau. Ceux qui les ciblent sont des criminels – qu’ils soient à Téhéran, Tel-Aviv ou ailleurs.

9 juin 2025

Roxane Borde / Diapason
6/6/2025

Michael Barenboim ne jouera pas en Israël

© DR
Le violoniste allemand, fils du maestro Daniel Barenboim, a une nouvelle fois exprimé son soutien aux Palestiniens.

Après avoir créé le collectif « Make Freedom Ring » destiné à récolter des fonds pour les Palestiniens grâce à des concerts organisés dans différentes villes d’Europe, Michael Barenboim continue de condamner la guerre menée par Israël à Gaza. Violon solo du West-Eastern Divan Orchestra et professeur à l’Académie Barenboim Saïd, deux institutions fondées par son père Daniel Barenboim afin de réunir des instrumentistes israéliens et des pays arabes voisins, le musicien juif allemand a une nouvelle fois explicité son opinion sur la situation au Proche-Orient. Il a ainsi déclaré au média musical VAN Magazin qu’il ne comptait pas remettre les pieds en Israël avant longtemps, que ce soit pour un concert avec l’Israel Philharmonic ou avec tout autre ensemble du pays, même non financé par l’État : « Je ne peux pas savoir ce que l’avenir nous réserve d’ici dix à vingt ans, mais je ne me vois pas voyager là-bas », confie-t-il sans équivoque, glissant à cette occasion qu’il n’avait pas non plus l’intention de se rendre aux États-Unis de sitôt.

Contre les agissements de l'Etat hébreu

Depuis le début de la guerre lancée par Israël dans la bande de Gaza après les attentats du 7 octobre 2023 menés par le Hamas, Michael Barenboim s’est exprimé à plusieurs reprises sur le sujet, critiquant notamment l’attitude de son pays, l’Allemagne, qui refuse toujours de condamner les agissements de l’État hébreu : « Il n’y a aucune raison que les Palestiniens souffrent de quelque chose que les Allemands ont fait il y a 80 ans », s’insurgeait-il au média The Times of Israel. Le musicien fait d’ailleurs partie des signataires d’une lettre ouverte adressée le mois dernier au ministre allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul, alors que son homologue israélien Gideon Sa’ar s’apprêtait à le rencontrer à Berlin. Dans cette tribune, les auteurs demandaient à leurs dirigeants d’arrêter de livrer des armes à Israël et de prendre au sérieux la menace de génocide. « Nombre de citoyennes et de citoyens de ce pays ont profondément honte de la position de l’Allemagne concernant le conflit au Proche-Orient », expliquent-ils.

De son côté, Michael Barenboim s’attache à rappeler qu’Israël n’est pas « la seule représentation du judaïsme » : « Je suis juif, n’est-ce pas ? […] Mais je ne veux pas être représenté par Israël », affirmait-il, toujours au journal The Times of Israel. Outre les concerts du collectif « Make Freedom Ring », Michael Barenboim, qui a aussi étudié la philosophie, organise une série de conférences sous le titre « Kilmé » (« mot » en arabe), au cours desquelles il laisse la parole à des artistes, intellectuels et universitaires palestiniens. Il a également fondé l’ensemble de musique de chambre Nasmé aux côtés de cinq instrumentistes palestiniens.

René Chiche

-9/6/2025- Inutile d'ajouter au bruit autour de la "flottille de la liberté". On rappellera seulement que flottille prend deux t et désigne une flotte de plusieurs petits bâtiments.
Pour le reste, étant professeur et non psychiatre, je m'abstiens de commenter ce nouveau délire collectif et souhaite force et courage aux habitants de la place de la République à Paris que j'ai quittée sans regret depuis une vingtaine d'années alors qu'elle n'était pas encore régulièrement inondée par les drapeaux du Hamas.

8 juin 2025

NOTRE FOLIE, NOTRE VÉRITÉ

Benoît Girard

-8/6/2025- Le conflit israélo-palestinien n'est pas un conflit périphérique que nous aurions à arbitrer du haut de notre supériorité morale, en fonction de nos attachements historiques ou de nos colères personnelles.
C'est un enjeu qui se déploie dans les profondeurs de l'anthropologie occidentale, un catalyseur conjoncturel de ce "tout est permis" qui creuse tout au long de notre histoire un sillon sanglant.
La même génération qui s'est structurée autour du "plus jamais ça" réactive en toute bonne conscience la rhétorique de Mein Kampf : l'illusion de l'être collectif et du péril existentiel qui justifie tout ; la négation du conflit et de ses rites au nom d'une position "défensive" qui voit dans toute altérité une menace à éradiquer. Les tabous ne protègent de rien : ils ne font que transporter dans le temps le souvenir fasciné de leur propre violation.
La bêtise joviale de nos "élites" médiatiques, la tranquillité et la bonne conscience avec lesquelles elles en appellent au meurtre... toutes ces postures dégoulinantes d'imbécilité satisfaite ont donc quelque chose de prophétique par quoi nous devons nous laisser éclairer plutôt que scandaliser. En effet, ce ne sont pas ces personnes qui parlent et nous n'avons pas, sauf à laisser contaminer notre propre cause par les miasmes de leur racisme et de leur ressentiment, à en faire nos boucs émissaires : elles sont parlées par les ressorts profonds de notre identité collective, trop longtemps occultés, et qui s'offrent désormais en spectacle. Ils ne résisteront pas à la lumière mais ça ne les empêchera pas, tels les derniers soubresauts d'un monstre blessé, de causer beaucoup d'horreurs et de souffrances. Seule notre compréhension de l'intérieur est capable d'infléchir le cours de l'inévitable.