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10 février 2023

L'IA intégrée aux moteurs de recherche

Vincent Verschoore

Nous sommes à un moment révolutionnaire de l'informatique personnelle. Après les PC et les premiers réseaux, après le web 2.0, les réseaux sociaux et les applications mobiles, voici venu le temps de l'information en ligne médiée par IA.
Nous en avons un premier aperçu depuis novembre 2022 avec le lancement public de ChatGPT 3,5, et ses équivalents graphiques comme DALL-E et Midjourney. D'ici peu va se dérouler une bataille de géants pour la domination de l'IA au même titre que s'est déroulée, voici vingt ans, la bataille de la recherche en ligne.
Cette bataille fut gagnée par Google, qui représente aujourd'hui 90% du marché du moteur de recherche, mais son éternel concurrent Microsoft (9% du marché avec Bing) compte bientôt récolter les fruits d'une stratégie audacieuse : ayant investi 1 milliard de dollars dans OpenIA, à l'origine de ChatGPT, Microsoft vient de remettre 20 milliards et a accès au moteur d'OpenIA, qu'il compte intégrer à son moteur de recherche Bing.
Le produit vient d'être présenté : en plus d'une recherche traditionnelle, l'utilisateur de Bing pourra affiner sa demande en langage naturel, comme pour ChatGPT mais en mieux car avec un lien permanent à Internet.
Le système pourra répondre aux questions sans réponse correcte, genre quelle est la meilleure bière, en proposant des réponses contextualisées. Il pourra répondre à des question purement utilitaires du genre « est-ce que l'armoire machin de chez Ikea rentre dans ma voiture truc », en allant chercher les dimensions de l'armoire et de la voiture, et en suggérant comment il serait possible de faire entrer machin dans truc.
Google, de son côté, travaille sur une IA nommée « Bard », basée sur le moteur LaMDA mais qui aujourd'hui en est au stade de ChatGPT. Il paraît que l'annonce de Microsoft a créé une panique rouge chez Google, qui met le paquet pour rattraper son retard dans l'intégration IA/moteur de recherche.
Un problème fondamental de l'IA type ChatGPT est qu'elle est capable de générer des fausses infos : si on lui demande de produire des citations de Newton au sujet d'Internet, elle est capable de les fabriquer. De plus, la profondeur des échanges entre l'IA et les utilisateurs, allant bien au-delà d'une simple suite de mots-clés, va renseigner Google ou Microsoft bien plus finement sur nos aspirations, et ainsi nourrir la machine commerciale et de profilage.
Pour les Gafam en effet, les « enceintes intelligentes » genre Alexia et les « assistants personnels vocaux » de nos téléphones sont avant tout des systèmes de collecte de données (qu'il faudrait systématiquement désactiver), et l'IA intégrée aux moteurs de recherche, d'autant plus si elle accepte la commande vocale, sera aussi un mouchard « intelligent » qui finira vite par nous connaître mieux que nous-mêmes, au grand bénéfice des profileurs (les Gafam) et de leurs clients (polices, services secrets, grandes enseignes, partis politiques etc.).