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2 mai 2025

L'EHPAD MENTAL DE L'INTELLIGENTSIA LIBÉRALE

Gabriel Nerciat

-2/5/2025- Je commence à en avoir un peu marre de la nouvelle scie chère à la bourgeoisie libérale éclairée sur les deux rives de l'Atlantique, qu'on peut résumer ainsi : trumpisme et wokisme sont la même chose, ou (ce qui revient au même) le trumpisme ne serait rien d'autre qu'un wokisme inversé.
C'est Stephen Pinker, ce producteur en série de poncifs centre-gauche, qui a lancé le gimmick depuis sa chaire du Massachussets après l'élection de Trump, aussitôt repris en France par toute une palanquée de plumitifs et d'universitaires sociaux-démocrates ou macroniens (Rosanvallon, BHL, Joffrin, Bruckner, Daoud, Badinter, etc.).
La grande mode, dès lors, est devenue la polémique de salon entre les progressistes qui dénient l'existence même du wokisme et les libéraux de gauche (ou de droite, d'ailleurs, comme le pauvre Finkie) qui expliquent que le wokisme existe bien mais ne diffère pas par essence du trumpisme (autre façon de dire qu'ils détestent Trump, tout en condamnant sans trop de risques les dérives de l'islamo-gauchisme décolonial).
Pour moi, cela indique surtout l'identité de la maladie dont souffre l'intelligentsia occidentale depuis déjà quelque temps : moins le fanatisme idéologique, comme aux deux ou trois siècles derniers, ou le conformisme rad-soc longtemps illustré par les vieux notables SFIO, que l'entrée définitive dans l'ère sénile de l'hiver des idées.
Car prétendre que le wokisme n'existe pas, ou admettre seulement la nocivité de sa présence pour le renvoyer dos à dos avec le conservatisme populiste illibéral d'un Trump ou d'un Vance, c'est soit se foutre de la gueule du monde, soit être devenu physiologiquement incapable d'observer ce que le réel est devenu.
En réalité, c'est plutôt une bonne nouvelle : pas la peine de s'en prendre à Pinker ou à ses émules, moins encore de les abreuver de noms d'oiseaux.
Ils ont eux-mêmes élaboré la maison de retraite mentale d'où ils ne sortiront plus.
Car mal nommer et mal identifier ses ennemis n'est pas seulement choisir la mauvaise cause ; c'est, catastrophiquement, fuir un champ de bataille historique que vous n'êtes plus en mesure d'influencer dans un sens ou dans l'autre.
C'est une fin bien pire, à mon sens, que celle du vieux Sartre aveugle en rupture de maoïsme ou le déclin morose de Jean-Jacques qui herborise en solitaire près du château d'Ermenonville.