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6 novembre 2025

Hortense Chauvin / Reporterre
6/11/2025

Gendarmes violents à Sainte-Soline : « On est effarés par la jouissance qu’ils semblent ressentir »

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Les vidéos des caméras-piétons des gendarmes sur la manifestation de Sainte-Soline montrent une « violence extrême », dit Hélène, membre d’un collectif de manifestants. Ils « sentent qu’ils ne risquent pas grand-chose ».

Dans une enquête publiée le 5 novembre, Mediapart et Libération révèlent le contenu des enregistrements des caméras-piétons des gendarmes déployés pour réprimer la manifestation de Sainte-Soline, en mars 2023. L’opération avait fait 200 blessés (dont 40 graves) parmi les manifestants, présents pour dénoncer la construction d’une mégabassine dans les Deux-Sèvres.

Les dizaines d’heures d’images analysées par Mediapart et Libération montrent que les gendarmes ont multiplié les « tirs tendus » de grenades, une technique interdite car potentiellement létale. On y entend également les gendarmes traiter de « pue-la-pisse » les manifestants, qualifier de « vrai kiff » le fait d’en avoir éborgné, décrire cet affrontement sanglant comme un « Nirvana » « magnifique » et « attend[u] depuis dix ans »...

Reporterre s’est entretenu avec Hélène, une des 73 membres d’un collectif de manifestants de Sainte-Soline ayant saisi la Défenseure des droits.

Quelle est votre réaction aux vidéos révélées par « Libération » et « Mediapart » ?

Nous avons été effarés par la violence extrême et décomplexée des gendarmes, et par la jouissance qu’ils semblent ressentir en en faisant usage. Les vidéos montrent qu’ils ont effectué des tirs tendus de grenades de manière systématique, à la demande de leur hiérarchie. Il ne s’agit pas du tout d’actes isolés, commis par erreur. Ces vidéos confirment ce que nous disons depuis le début : la violence était du côté de la gendarmerie.

Dans les vidéos, les gendarmes cachent parfois leurs caméras. On voit malgré tout qu’ils sont à peu près certains de ne pas être poursuivis. On en entend un faire de l’humour avec son supérieur au sujet des tirs illégaux qu’il vient d’effectuer, et qui ont touché quelqu’un en pleine tête. Il ironise sur le fait qu’il n’avait pas le choix, qu’il avait dû s’adapter au vent… Son superviseur lui répond qu’il pourra témoigner en sa faveur en riant.

« Résidus de capote », « pue-la-pisse », « illuminé » : on entend les gendarmes utiliser des termes extrêmement dégradants pour vous qualifier…

Sur le coup, nous avions déjà senti que nous n’étions plus considérés comme des êtres humains. L’entendre aussi crûment, c’est bouleversant, parce qu’on sait quelles ont été les conséquences de cette déshumanisation.

À un moment, l’un d’entre eux dit : « Faut qu’on les tue » ; un autre qu’il faut nous « massacrer ». Il y a un contraste immense entre la légèreté avec laquelle ces mots sont prononcés, et leurs effets dans le réel. Des manifestants ont failli être tués. La vie de beaucoup d’entre eux a été fracassée. Des chairs ont été arrachées, des projectiles retrouvés à l’intérieur de corps. Certains manifestants ont toujours des séquelles de cette journée, et en auront toute leur vie.

« L’un d’entre eux dit : “Faut qu’on les tue” »

Il y a aussi beaucoup d’insultes sexistes et homophobes : « fils de pute », « enculé »… La gendarmerie est une institution très masculine. Il faut s’interroger sur la manière dont elle peut produire ce genre de comportement, que ce soit par le recrutement ou la formation. On voit bien, dans les vidéos, que ces comportements sont tolérés, voire encouragés par la hiérarchie. Il n’est jamais dit, à aucun moment, que s’exprimer de cette façon pose problème.

Qu’est-ce que ces images disent de l’institution policière et de la manière dont elle perçoit les militants écologistes ?

Je crois que cela montre que les forces de l’ordre ne sont pas faites pour protéger la population, contrairement à l’idée que l’on peut en avoir. Elles sont faites pour protéger des intérêts, en l’occurrence privés, puisque la mégabassine n’était pas construite par l’État.

Les forces de l’ordre n’ont pas du tout agi dans l’intérêt général. Un tel mépris à l’égard d’une partie de la population pose également un problème démocratique. Ces vidéos donnent l’impression que nous n’existons pas, à leurs yeux, en tant que citoyens et citoyennes ; que notre parole n’a pas à être entendue, puisque nous serions des « fils de pute », des « chiens ». La contestation n’est pas tolérée. Nous sommes réduits à des ennemis, à des adversaires, qui doivent être punis suffisamment fort pour ne plus jamais avoir envie de revenir manifester.

La mobilisation de Sainte-Soline a été exceptionnelle en nombre de grenades lancées, mais il faut rappeler que la violence de la police n’est pas exceptionnelle. Dans les quartiers populaires, elle s’exerce depuis de nombreuses années. La plupart des personnes qui meurent de crimes policiers sont des personnes racisées.

Les militants écologistes sont-ils devenus une cible de choix pour les forces de l’État ?

Cette violence et ces insultes ne viennent pas de nulle part. Elles sont en lien avec un discours gouvernemental qui a infusé au sein des forces de l’ordre. [Le ministre de l’Intérieur de l’époque] Gérald Darmanin a construit une figure de l’écolo comme ennemi, en disant avant la manifestation qu’il fallait s’attendre à une très grande violence, que les personnes présentes voulaient tuer les gendarmes et les institutions… Après coup, il a qualifié les manifestants d’« écoterroristes ».

« Darmanin a construit une figure de l’écolo comme ennemi »

Globalement, les militants écologistes sont de plus en plus réprimés. Pas seulement par la police, mais aussi par la justice, avec des peines de prison prononcées pour de la désobéissance civile, ou pour des dégradations assez mineures. Le macronisme entraîne le pays dans une dérive antidémocratique. La contestation ne semble plus tolérée. Tout ce qui ne veut pas rentrer dans le rang est considéré illégitime et criminalisé.

Craignez-vous qu’une éventuelle arrivée de l’extrême droite au pouvoir, en 2027, libère d’autant plus la violence policière qui s’exprime de manière manifeste dans ces vidéos ?

On voit déjà, dans ces vidéos, que les gendarmes ont le sentiment de ne pas risquer grand-chose. Avec l’extrême droite au pouvoir, ils se sentiraient d’autant plus légitimes.

Que faudrait-il faire pour réformer la police, éviter que ce genre de situation se reproduise ?

Certaines armes devraient clairement être interdites, notamment les LBD [lanceurs de balles de défense], comme le recommande d’ailleurs la Défenseure des droits. Idem pour les grenades GM2L, qui blessent beaucoup trop gravement. Les grenades lacrymogènes, en tir tendu, peuvent également tuer. En France, la police est surarmée, ce qui n’est pas forcément le cas dans d’autres pays.

En ce qui concerne Sainte-Soline, et les mégabassines en général, le problème est aussi politique. Les choses auraient pu être faites autrement, sans passer par un dispositif de maintien de l’ordre extrêmement violent. Si on nous avait laissé accéder à la bassine, par exemple, il ne se serait pas passé grand-chose. Il ne pouvait pas y avoir de dégradation. Notre présence aurait été symbolique.

Il était également possible de faire un moratoire sur les mégabassines, ou simplement d’essayer de rétablir le dialogue plutôt que de passer en force, ce qui ne peut qu’engendrer de la violence.

Je soutiens Reporterre

5 novembre 2025

Dessin d'Ignace
Natalia Routkevitch


- 5/11/2025 - En lisant ce matin les commentaires extatiques devant ce "souffle d’air frais", ce « formidable coup de jeune », cette "vague de lumière et d’espoir", cette "étincelle de renouveau" - je me suis rappelée une réflexion de David Graeber, qui nous a quittés il y a déjà cinq ans, et qui avait pertinemment analysé la façon américaine d’usurper certains rôles, comme celui du « phare des démocraties » (pour un pays extrêmement inégalitaire dont la Constitution originelle ne mentionne pas la démocratie et dont tout le système est fait pour empêcher la démocratie et perpétuer les inégalités, c’est quand même fortiche), mais aussi celui d’avant-garde de l’humanité. J’ai retrouvé l’extrait en question, le voici :
"Pendant des décennies, l'Amérique s’est engagée dans une bataille pour incarner l’avenir. Cela est vrai depuis la Guerre froide, et probablement même avant, car dès le XIXᵉ siècle, les États-Unis se présentaient déjà comme une société nouvelle, née sur une toile vierge. Bien sûr, cette toile n’était vierge qu’en apparence : elle avait été vidée de ses habitants d'origine, exterminés. Mais l’idée de l’Amérique comme figure du futur était bien ancrée déjà à cette époque.
Tocqueville affirmait que deux visions du futur s’affronteraient au XXᵉ siècle : celle de la liberté, incarnée par l’Amérique, et celle de l’autorité, incarnée par la Russie - deux nations encore en pleine conquête territoriale à l’époque. Après la Seconde Guerre mondiale, cet affrontement devint explicitement idéologique, et c’est pourquoi il était si crucial pour les États-Unis de remporter la course à l’espace : il s’agissait de s’approprier le symbole même du futur. Pour beaucoup de gens, partout dans le monde, l’Amérique a en effet représenté une forme d’avenir, sans que l’on sache exactement lequel : technologique, ouvert, célébrant la jeunesse, son "énergie créatrice" et ce fameux « can-do attitude » qui semblait pouvoir résoudre tous les problèmes.
Mais les choses ont bien changé. Tandis que l’hégémonie culturelle des États-Unis, même affaiblie, demeure puissante, sur le plan politique, en revanche, depuis la fin de la Guerre froide, la politique américaine semble régresser, cherchant à atteindre ce que de nombreux pays ont déjà connu et que les Américains eux-mêmes n’ont pas vécu.
D’un côté, l’aile Sanders du Parti démocrate, ou les sociaux-démocrates, essayent de promouvoir des mesures qui existaient déjà dans la plupart des pays européens - et dans bien d'autres régions - dans les années 1950. De l’autre, la droite trumpiste ressuscite diverses formes de fascisme, nous ramenant à une situation que de nombreux pays, de l’Allemagne à l’Argentine, ont connue dans les années 1930. Il devient donc difficile de voir l’Amérique comme un modèle d’avenir, lorsque ses politiciens les plus radicaux s'écharpent violemment pour savoir quelle partie du passé il faudrait restaurer. »

Gastel Etzwane

- 4/11/2025 - L’une des plus anciennes entreprises de France, les Aciéries de Bonpertuis en Isère, fondées au XVe siècle, vient d’être liquidée car elle ne pouvait plus faire face à l’explosion du coût de l’énergie. Ce n’est pas une faillite symbolique ou anecdotique : c’est le symptôme d’un mécanisme désormais systémique et national.
Depuis quinze ans, la France a perdu son avantage compétitif historique : l’électricité française nucléaire, qui était l’une des moins chères d’Europe, a été alignée artificiellement sur les prix européens par les règles de l’Union européenne, imposées notamment sous pression allemande. Ce mécanisme dit de marché « intégré » a amputé brutalement la souveraineté énergétique française et a créé une situation paradoxale : la France, qui disposait en propre d’un parc nucléaire abondant, stable et performant, paie désormais son électricité comme si elle était dépendante du gaz.
Puis est venu le second choc, brutal : les sanctions contre la Russie ont fait flamber les prix mondiaux du gaz, du pétrole et de l’énergie en général ; et ce choc s’est retourné contre les économies européennes beaucoup plus violemment que prévu. Pour des industries très énergivores comme l’acier, ce double effet cumulatif a été fatal.
Ce qui arrive à cette entreprise séculaire n’est pas un accident isolé : c’est la conséquence directe d’un choix politique européen qui a détruit un avantage stratégique français, puis d’un choix géopolitique qui a aggravé le coût réel de l’énergie. Ce qui frappe une aciérie de 600 ans aujourd’hui frappera mécaniquement d’autres secteurs demain.

Marc Amblard
5/11/2025

Qui veut encore payer davantage d’impôts pour un pays qui s’effondre ?

H16

- 5/11/2025 - Il y a deux types de Français : ceux qui ont fui l’enfer fiscal, et ceux qui règlent encore leurs impôts mais qui regardent discrètement le prix des appartements à l’étranger. Ces derniers, en nombre croissant, sont fatigués ; à en croire les parlementaires, l’État français aurait avant tout un problème de recettes qu’il convient de traiter par un nouveau tabassage fiscal plus solide.

Pour ces Français, l’envie de partir n’a jamais été aussi forte. C’est en tout cas ce que laisse entendre un récent article du Figaro qui décrit ces Français épuisés par un pays dont les politiciens sont maintenant complètement déconnectés du réel – ils vivent sur la Lune mais on leur paye l’aller-retour – dans lequel vivre de son travail devient de plus en plus difficile voire ingrat, et pour lequel on peine de plus en plus à voir un avenir serein.


La tendance n’est pas nouvelle, mais elle est de plus en plus visible, de plus en plus facilement exprimée sur tous types de médias : il y a quelques jours, à l’occasion des débats – aussi fiévreux que débiles – sur la taxe Zucman, une chaîne télé proposait un reportage sur un patron d’entreprise qui envisage très calmement de s’en aller si la pression fiscale continue d’augmenter ainsi.

Pour certains, le pas est déjà franchi : la société Criteo a ainsi déjà décidé de sa relocalisation aux États-Unis pour fuir ce qui est devenu l’enfer fiscal français. On ne s’amusera qu’un moment du fait que le patron de cette société, toute hypocrisie bue, soit un soutien affiché pour la taxe Zucman qu’il semble gourmand de voir appliquée… aux autres.

Et lorsque l’on regarde du côté des gérants de fonds et de fortune, ils confirment sans barguigner : c’est un véritable tsunami de familles – pas toutes fortunées, mais toutes lucides – qui vient les voir pour commencer les démarches d’expatriation et les mesures concrètes pour sortir les capitaux d’un pays dont la taxophilie est devenue folle.

En bref, à l’heure où les politiciens de tout bord cherchent à ponctionner comme jamais les populations par tout les moyens, ceux qui ont de l’argent, ou des compétences, ou les deux sont déjà en train de quitter le pays voire le continent pour aller vers des cieux plus cléments.


Cet exode silencieux s’accélère.

Les plus visibles, les millionnaires, quittent la France : selon le cabinet de conseil britannique Henley & Partners, la France est ainsi dans le top 10 des pays que les millionnaires fuient. En 2025, 800 devraient quitter le pays.

On peut certes se consoler en comparant ce faible nombre à celui affiché par le Royaume-Uni, actuellement en première place avec 16.500 millionnaires (un véritable Brexit fiscal) choisissant d’autres cieux. Mais ces deux pays européens se retrouvent à coté de la Chine (-7800) ou de la Russie (-1500) dans le classement, ce qui permet de bien comprendre la dynamique en place.

Inversement, les pays qui attirent le plus ces millionnaires sont souvent des petits pays comme les Émirats Arabes Unis, qui domine la liste des pays accueillant le plus de millionnaires avec 9800 en 2025. On trouve aussi la Suisse avec +3000 ou Singapour avec +1600. Les pays anglo-saxon (hors Royaume-Uni) continuent d’attirer à eux les patrimoines et les créateurs, l’Australie et le Canada attirant chacun 1000 millionnaires.

Parmi les grandes puissances, seuls les États-Unis restent une valeur sûre en occupant la deuxième place avec +7500. En Europe, et probablement en raison des arrangements fiscaux proposés par le gouvernement Meloni, l’Italie est aussi devenue une place attractive avec +3600 millionnaires.

Il n’est pas difficile de voir les points communs entre les pays repoussoirs d’un coté et les pays attractifs de l’autre : les premiers s’enfoncent dans une bureaucratie plus ou moins délirante, des réglementations à foison, une fiscalité de plus en plus prohibitive et à la fin, l’autoritarisme. De l’autre, les seconds favorisent les entreprises et leurs créateurs et les gens fortunés, ces derniers étant généralement des chefs d’entreprise.

Cependant, les riches ne sont pas les seuls à quitter la France, les jeunes – et maintenant, les moins jeunes – qui ont des compétences émigrent eux aussi.


On l’a vu récemment, 10% des diplômés des grandes écoles quittent la France et ce taux monte par exemple à 20% pour Polytechnique. Les raisons invoquées sont, sans surprise, la fiscalité et, plus récemment, la perception d’une France en déclin. Selon les statistiques du Ministère des Affaires Étrangères sur les Français à l’étranger, « 171 884 sont inscrits pour la Suisse, 159 357 inscrits pour les États-Unis, 141 065 inscrits pour le Royaume-Uni, 123 226 inscrits pour la Belgique et enfin 118 772 inscrits pour le Canada ». Eh oui, les destinations étrangères favorites des Français pour leur installation sont principalement les pays anglosaxons (et si possible nord-américains où la croissance des Français ces dernières années est la plus importante) ou des pays voisins avec plus d’opportunités (et une meilleure fiscalité pour la Suisse).

Il faut être aveugle (ou élu) pour ne pas voir le ras-le-bol omniprésent dans toutes les strates de la société française et, en particulier, chez les populations les plus essentielles, celles qui créent de la richesse et fournissent les capitaux, et qui décident à présent de voter avec leurs pieds.

Enfin, notons que si la situation est particulièrement aigüe en France, on retrouve le même phénomène au niveau européen : beaucoup en Europe ne se retrouvent plus dans la situation actuelle du continent et méprisent ses dirigeants, comme le prouve par exemple la proportion qui serait prête à se battre pour son pays. Selon un sondage Gallup de 2024, seulement 29% des Européens de l’Ouest seraient ainsi prêt à prendre les armes pour leur pays en cas de guerre.

Les modèles de société et de gouvernance que proposent les dirigeants en France ou au Royaume-Uni ont perdu toute attractivité et sont devenus de véritables repoussoirs. Comme les dictatures du tiers-monde, l’Europe subit actuellement un exode des cerveaux et des capitaux, pour le plus grand profit de pays comme les États-Unis dont l’actuelle administration a déjà compris tout le parti qu’elle pouvait tirer de cette tendance.

Est-ce un hasard si Trump envisage d’accepter les réfugiés européens persécutés pour leurs idées ‘populistes’ ?


4 novembre 2025

Gastel Etzwane

- 4/11/2025 - Voici une nouvelle démonstration, éclatante et implacable, de la nature réelle de l’Union européenne : elle ne protège pas les nations, elle les expose, elle les fragilise, elle les appauvrit, et elle sanctionne même ceux qui osent tenter de défendre leurs intérêts vitaux. Rien n’est plus clair que ce qui vient de se produire avec la Pologne, la Hongrie et la Slovaquie : trois États européens qui prennent une décision politique élémentaire, rationnelle, légitime, protéger leurs agriculteurs, et Bruxelles réagit non pas en dialoguant, non pas en comprenant, mais en menaçant de sanctions.
Ces trois pays s’opposent à l’invasion de produits agricoles ukrainiens à bas prix, lesquels déstabilisent leurs marchés intérieurs déjà sous tension, ruinent les producteurs locaux, et détruisent la souveraineté alimentaire, qui est le fondement même d’une puissance réelle. C’est exactement ce que doit faire un État digne de ce nom : protéger son agriculture avant tout, protéger ceux qui nourrissent le peuple, protéger ses producteurs avant d’enrichir des acteurs extérieurs.
Et que fait l’Union européenne ? Elle exige l’ouverture totale, elle impose le risque, et elle veut punir ceux qui résistent. Cette logique est parfaitement cohérente avec sa trajectoire historique récente : l’Union européenne n’a jamais été construite pour renforcer les nations, mais pour les dissoudre dans un marché unique où la norme, la libre circulation et le dogme idéologique priment sur la réalité nationale et sur la souveraineté économique.
Ces trois pays, eux, prouvent qu’il existe encore en Europe des gouvernants capables d’agir en hommes d’État, capables de dire non, capables de défendre leur peuple. Ils n’ont pas accepté la soumission automatique. Ils n’ont pas accepté de sacrifier leurs agriculteurs.
Et si la France était encore souveraine, si elle était encore dirigée par des responsables politiques conscients du réel et non par des exécutants d’appareils supranationaux, elle ferait exactement la même chose. Car un pays qui ne protège pas son agriculture commence par perdre sa souveraineté alimentaire, puis sa souveraineté économique, puis sa souveraineté politique. Et il finit par disparaître.


Gastel Etzwane
4/11/2025

The Economist – édition du 1er au 7 novembre 2025.
Il faut commencer par rappeler une scène parfaitement documentée : deux néo-conservateurs américains, John McCain (désormais décédé) et Lindsey Graham, s’étaient rendus en Ukraine avant même le déclenchement du conflit, pour y encourager les responsables militaires ukrainiens à “tenir bon” et à entrer dans l’affrontement avec la Russie. Cette image est un symbole : l’initiative, le tempo, l’allumage, tout cela ne venait pas d’Europe. Cela venait de Washington.
Et aujourd’hui, The Economist titre froidement : « Europe’s Opportunity ». Avec un casque recouvert de billets. C’est au moins honnête : l’occasion de faire de l’argent sur une guerre qui tuera des jeunes, des deux côtés. Voilà le véritable cœur du projet : transformer l’Europe en comptable, en investisseur spéculatif, en participant financier d’un conflit qui ne profitera, au bout du compte, qu’aux États-Unis.
On peut trouver cette iconographie répugnante. Mais elle a le mérite de dire la vérité nue : on reconnaît que la guerre est un business. L’économie avant la paix. Le profit avant la vie. Ce cynisme assumé est infiniment plus inquiétant que le discours officiel. C’est le réel.
Et en France et dans d’autres pays européens, on veut nous faire croire que le conflit est inévitable. Le plus grand mensonge du moment.

CONSIDÉRATIONS INTEMPESTIVES SUR LE RÔLE DU SAVOIR ÉCONOMIQUE EN POLITIQUE

Gabriel Nerciat

-4/11/2025- Je suis toujours surpris quand j'entends les membres de la classe politique, universitaire ou médiatique, parler des compétences économiques des uns et des autres – parlementaires, intellectuels ou simples quidams.
Ayant été contraint depuis quinze ans, pour des raisons professionnelles, de me doter d'un savoir économique assez conséquent alors que ce n'était pas du tout la discipline que j'avais étudiée à l'université dans mes jeunes années, je me suis rendu compte d'un paradoxe que le temps qui passe ne dément pas : les chefs d'entreprise les plus doués, pour qui ou auprès de qui j'ai été amené à travailler en général, n'entendaient rien à l'économie ou pas grand-chose (parfois même, ils la confondaient avec un simple savoir comptable), tandis que les cadres, les journalistes ou les patrons qui arguaient, à tort ou à raison, d'une certaine maîtrise dans ce domaine, rataient la plupart du temps une grande partie de ce qu'ils entreprenaient, ou ne comprenaient rien aux tendances du marché qu'ils avaient sous les yeux.
Je pourrais en dire autant dans le domaine politique : Raymond Barre, par exemple, qui passait pour le plus grand professeur d'économie français de son temps, a laissé un pays en proie à l'inflation galopante et au chômage de masse, mûr pour la sclérose socialiste et européiste qu'après lui François Mitterrand allait mettre en oeuvre pendant quatorze ans, tandis que Georges Pompidou, l'architecte du décollage économique et industriel de la nation, était un agrégé normalien de lettres classiques qui avait passé plus de temps à lire Baudelaire et Mallarmé que Keynes ou Schumpeter.
La confusion vient du fait que la plupart des gens qui croient connaître l'économie sont persuadés, qu'ils aient lu ou non Walras ou Pareto, que celle-ci est une science, au même titre que la géologie ou la physique des particules.
Or, si l'économie était une science, les économistes ne se tromperaient pas aussi souvent. Bien plus souvent en réalité que les météorologistes.
Non seulement il y a relativement peu de lois économiques qui soient totalement universelles, mais de plus les critères à l'aune desquels on évalue la pertinence économique d'une politique budgétaire, monétaire ou fiscale varient en fonction des auteurs, des écoles ou plus banalement des circonstances changeantes d'une nation (pour certains, par exemple, le déficit commercial record de la France ou des États-Unis est un indice de déclin économique indubitable alors que pour d'autres, obnubilés par les cours de bourse, le niveau de l'épargne ou les statistiques plus ou moins fiables du chômage, ils s'en soucient comme d'une guigne).
La plupart du temps, les économistes attitrés qui ont l'honneur des plateaux de télévision ne font que répéter des recettes approximatives en fonction de leur orientation idéologique personnelle (keynésienne ou hayekienne, en général).
Certains, comme Paul Romer et sa théorie fumeuse de la croissance endogène, ne font rien d'autre que vendre une sorte de pensée magique à base de grigri sophistique, qui est idéale pour appâter les sots et vendre cher des rafales de vent au beau milieu de la pluie.
À mon sens, la réussite économique d'un gouvernement tient moins à la connaissance de l'équilibre général walrassien ou des agrégats keynésiens qu'à un talent personnel assez proche de celui du joueur de poker professionnel, rompu à toutes les combinaisons de son jeu ainsi qu'à quelques discrètes tricheries étayées par la connaissance psychologique de ses concurrents directs.
Les impôts, les taxes, les investissements publics, les coupes budgétaires ou les dévaluations du cours d'une monnaie sont semblables à la façon dont la couleur et le rang de certaines cartes appariées par un mélange de chance et d'adresse en fonction des probabilités fragiles que le cours du jeu révèle, permettent de constituer un brelan ou une quinte flush royale ou bien, au contraire, de perdre sa mise au moment même où on croyait se refaire (c'est un peu ce qui est arrivé à Macron et Le Maire au sortir de la période du covid).
En gros, un type qui prétend condamner a priori une politique parce qu'elle ne lui paraît pas validée par une expertise économique prétendûment orthodoxe ou savante, a toutes les chances d'être beaucoup plus inapte à interpréter les évolutions des marchés ou les réactions, souvent imprévisibles, des entrepreneurs, investisseurs ou épargnants-consommateurs que celui qui aborde la matière économique tel un chasseur en partance vers la forêt sans rien connaître des gènes ou des mœurs des proies qu'il va essayer de tuer.
Plutôt que d'évaluer la culture économique de tel ou tel député, c'est plutôt leur pratique de la chasse à courre ou leurs performances au poker que je jugerais pertinent d'interroger.
Pas vous ?
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3 novembre 2025

Une seule conclusion : ce pays est foutu

H16

-3/11/2025- Ces deux dernières semaines, les parlementaires français ont largement démontré qu’ils n’avaient plus aucune limite lorsqu’il s’agit de taxer les Français. Nous avons assisté à un véritable festival de nouveaux impôts, de taxes et de ponctions diverses, venant de tous les côtés de l’hémicycle.

On pourra toujours se rassurer en se disant que, grâce à la navette parlementaire et aux travaux du Sénat, tout ceci va être balayé, nettoyé et renvoyé à une page blanche. Peut-être le Sénat ne conservera-t-il que la partie la plus minime des modifications et amendements apportés par les parlementaires en délire.

Peut-être, ou peut-être pas. Néanmoins, quoi qu’il arrive, ce qui s’est passé a permis de lever tout doute quant à l’idéologie et aux aspirations des législateurs actuellement sur les bancs de l’Assemblée.


Il apparaît ainsi qu’il n’existe aucun parti favorable à la liberté en France tout comme il n’existe aucun parti qui cherche à couper dans les dépenses de l’État, à en réduire le périmètre, à ramener celui-ci au strict régalien et à redonner des marges de manœuvre aux Français et à leurs entreprises. Tous se sont bousculés pour inventer de nouvelles taxes, de nouvelles ponctions, de nouveaux impôts. Et lorsque certains s’inscrivaient contre telle taxe, c’était pour mieux en proposer une autre, plus à leur goût.

Rien n’illustre mieux la tendance que lorsque le Rassemblement national a ouvertement voté des amendements et des lois que LFI ne renie que pour des raisons de forme et absolument pas de fond. Les LR et le PS ont fait assaut d’inventivité pour tabasser le contribuable français. Pas un parti n’a proposé de couper drastiquement des dépenses d’un État devenu pourtant obèse. De tous les côtés, c’est un véritable festival de taxes et de nouvelles ponctions. Le pillage est devenu institutionnalisé, et la députaillerie est en roue libre.

Dans cette tempête de taxation, il n’y a que quelques personnalités qui se dégagent (comme Knafo ou Lisnard) mais elles sont à peu près inaudibles en dehors des réseaux sociaux et, pire, leurs partis (ici, LR et Reconquête) sont encore furieusement engluées dans la mélasse étatique.


Du côté des médias, le constat est exactement le même. Eux aussi sont très favorables au tout-à-l’État. Ainsi, dans une proportion écrasante, les invités de plateaux télé sont ultra-favorables aux ponctions, aux impôts et aux taxes. Les rares voix dissidentes n’ont de place que sur une ou deux chaînes, au mieux, et au contraire de certains économistes de foire comme Zucman, n’y ont pas leur rond de serviette.

Il en va de même dans la presse : ses subventions venant de l’État, elle prête donc chaque jour une allégeance gênante d’obséquiosité à son principal financier. Et c’est encore plus gluant d’aplatissement lorsque, toute honte bue, cette même presse jamais à court d’anathème contre les milliardaires, reçoit des millions de certains d’entre eux.

D’un bout à l’autre du spectre médiatique, l’étatisme, le collectivisme et la foire à la saucisse taxatoire règnent en maître.

Mais dans ce tableau, ce qui est encore plus préoccupant concerne la population française elle-même : de sondage en sondage, tout indique qu’elle est favorable, par exemple, à des taxes sur le patrimoine, sans comprendre qu’elle les paye déjà, sans comprendre que ces nouvelles ponctions ouvrent la voie à de véritables pillages organisés, sans comprendre que plus on augmente la ponction des riches, plus on affame les pauvres, sans comprendre que si la France devait devenir riche et prospère grâce aux taxes, elle le serait depuis longtemps, étant le pays le plus taxé du monde.

Eh oui, il ne reste que les réseaux sociaux et quelques points de ralliement sur internet (quelques médias alternatifs) pour présenter un autre son que celui du glas pour le contribuable.

Oh, bien sûr, les réseaux sociaux sont parfaitement capables de mobiliser les individus et leur permettre de s’organiser. Ils sont même capables de générer des mouvements et des manifestations, et sont très efficaces pour fédérer.

Mais cela ne va pas plus loin ; on l’a vu à l’occasion de l’épisode des Gilets jaunes : dès que le pouvoir se sent menacé, dès que les syndicats se sentent écartés, dès que les médias officiels n’y comprennent plus rien, immédiatement, toute la gauchisterie et la députaillerie se mettent en ordre de marche pour récupérer le mouvement et le transformer en un nouvel avatar de réclamations catégorielles et typiquement socialistes ou étatiste.


Il faut se résoudre à l’évidence : lorsque beaucoup plus de la moitié de la population d’un pays est décidée à vouloir taxer la partie congrue, rien ne semble pouvoir l’arrêter.

Les discours étayés n’ont mené à rien, les raisonnements ne pénètrent pas, les exemples passés et ceux pris dans le reste du monde ne servent à rien. À chaque fois, les gauchistes et les collectivistes refusent d’entendre et considèrent leurs solutions comme les seules viables. Une majeure partie de la population veut absolument essayer les solutions collectivistes et socialistes qui sont actuellement proposées partout dans les partis et les médias.

Ils sont persuadés que « c’est sûr, cette fois ça va marcher » : « instruits » (ou déconstruits) par une Éducation nationale devenue progressivement marxiste voire complètement débile, ils croient fermement aux âneries débitées avec certitude par une armée de professeurs, d’experts et de chercheurs, eux-mêmes douillettement protégés des réalités de terrain et persuadés des consternantes stupidités pondues par des mensuels comme Alternatives Économiques et distribués avec générosité dans tous les établissements scolaires de France & de Navarre.

Eh oui : la propagande commence tôt, et, en plus de soixante ans, elle a très bien fonctionné.

Ces gens ne pourront rien comprendre de ce qui va se passer : pour paraphraser Upton Sinclair, il est impossible de leur faire comprendre quelque chose lorsque leur survie dépend précisément du fait qu’ils ne la comprenne pas.

Il faudra donc pour eux faire l’expérience, directe et inévitable, dans leur chair, des malheurs produits par le socialisme, le collectivisme et l’étatisme. Il faudra en passer par les longues files d’attentes, les pénuries, par la guerre de tous contre tous, par la misère, la jalousie exacerbée et l’espionnage constant qui en découle, pour qu’enfin les gauchistes français, si persuadés de leurs idées géniales, finissent par se taire.

Inévitablement, le pays va donc droit à sa faillite, la plus sale, celle où tout le monde dépendra finalement de l’État, et où il ne sera plus là pour personne.

En avril 2008, constatant le niveau de plus en plus médiocre de la classe politique, je notais pour la première fois « Ce pays est foutu », antienne devenue rituelle dans ces colonnes.

Depuis, chaque année passée, puis l’accélération récente ont confirmé la direction prise et sa conclusion logique : ce pays est foutu, certes. Mais cela apparaît maintenant comme une étape indispensable.


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