Gabriel Nerciat
-6/6/2025- C'est la fameuse réplique qui opposa, à la fin du Xe siècle, le nouveau roi de France Hugues Capet au comte Aldebert de la Marche, lequel avait contribué à son élection à Senlis quelques années plus tôt, à la mort du dernier prétendant carolingien.
- Aldebert, qui t'a fait comte ?
- Hugues, qui t'a fait roi ?
L'algarade récente qui a opposé Trump à Musk est moins lapidaire et beaucoup plus grotesque (nous sommes en Amérique, le pays de Barnum et de Buster Keaton), mais je crois qu'elle passera à la postérité de la même manière.
La confrontation - inévitable à terme même si elle intervient ou se consolide entre deux périodes de collaborations temporaires face à l'emprise déclinante des oligarchies bureaucratiques et transnationales - entre les chefs d'Etat souverainistes ou nationaux-populistes (aux Etats-Unis, on dit "social-nativiste") et les ploutocrates libertariens de la tech mondialisée sera aussi déterminante, au XXIe siècle, que celle qui opposa, de Philippe le Bel à Mazarin, ou en Allemagne de Frédéric Barberousse à Charles Quint, les rois et les empereurs de droit divin aux grands féodaux et condottieres du Bas Moyen-Age et de la Renaissance.
On sait évidemment qui l'emportera à la fin (au niveau de la compréhension du réel, les libertariens, surtout quand ils sont intellectuellement assez brillants, ne sont pas tellement plus doués que leurs frères ennemis les gauchistes libertaires), mais ce n'est pas parce qu'on connaît la fin d'un film qu'il ne va pas être passionnant à suivre ni bourré de rebondissements inattendus.
A mon sens, ceux qui en rient ne le feront pas longtemps, et ceux qui le déplorent en seront pour leurs frais.
Monsieur Francis Fukuyama, lui, en attendant, vient de prendre deux nouvelles tours en verre sur la gueule.
Et là, pour le coup, c'est plutôt réjouissant.
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