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7 décembre 2022

Retraite : l’arrêteront-ils, cette fois ?

Gilles La Carbona

Pendant combien de temps les députés de l’opposition vont-ils laisser ce gouvernement libre de tout mouvement ? Après combien de 49.3 se décideront-ils à le renverser ? Jusqu’à présent, le motif pour s’abstenir de participer au vote d’une motion de censure a été quasi religieux. Une sorte de règle immanente les pousserait à ne rien voter sous peine de provoquer l’indignité politique à vie. L’objection dirimante fait à présent long feu, le constat lui est sans appel. La Macronie fait ce qu’elle veut et se régale de ces joutes puériles. Elle s’adosse à ce semblant d’excuses pour non seulement poursuivre sa politique sans jamais céder sur rien, et en profite pour humilier et mépriser la représentation nationale en lui ôtant le droit au débat, en faisant des députés, de simples figurants.

Le jeu doit plaire aux oppositions, puisqu’elles s’échinent à rester sur une posture idéologique aussi improductive que néfaste. En effet, quand la NUPES dépose une motion, elle le fait dans la seule crainte qu’elle soit votée par le RN et qu’elle puisse donc passer. Dans ce cas pourquoi perdre son temps à la déposer ? Le RN lui, ne peut qu’en voter, ce qu’il a déjà fait d’ailleurs, mais en déposer une se heurte au farouche rejet des deux autres oppositions, qui y voient une alliance impossible. Les LR eux, non seulement n’en déposent pas, mais en plus n’en votent aucune, arguant que cela déboucherait sur le désordre, confondant par méprise ou stupidité, coup d’État et procédure constitutionnelle légale. Une motion de censure renvoie aux urnes, pas aux barricades. Dans ce jeu de dupes les électeurs ne s’y retrouvent pas, eux qui majoritairement ont exprimé en juin la volonté de bloquer Macron, se retrouvent cocufiés par ceux-là même qui promettaient de contrer Macron, notamment sur sa réforme des retraites.

Ce cirque a brillamment été dénoncé par Nicolas Dupont Aignan, vidéo qui tourne en boucle et qui va faire boule de neige. Les classiques arguments s’effritent. Borne va présenter sa réforme des retraites, elle entend déjà utiliser une nouvelle fois le 49.3. Pourquoi s’en priverait-elle, puisque ça marche ? Quand on sait que le financement des retraites n’est nullement en danger, bien au contraire, que nous avons plus de 10 ans avant qu’une quelconque difficulté financière vienne compromettre les versements, on ne peut qu’être contre ce projet, tout en souhaitant d’autres pistes pour pérenniser un système nullement à l’agonie. D’autant qu’il s’appliquerait aux personnes nées en 1961, autrement dit pour celles qui sont censées partir en 2023. C’est aussi sans compter avec la pénibilité de certains métiers, où arriver à 65 ans sans encombre relève du miracle. Il ne faut pas se leurrer, les licenciements à partir de 58 ans seront légions et avec la baisse des indemnités chômage, il faut s’attendre à une paupérisation violente de ceux qui auraient pu partir à la retraite. Ils devront apprendre la précarité, demander le RSA, faute à cet âge-là, de retrouver du travail. La réforme est brutale et injuste, comme tout ce que fait la Macronie, et en plus inutile. Si ne pas voter une motion de censure sur le budget, ou personne ne comprend rien, peut laisser indifférent les électeurs, il n’en sera pas de même concernant cette loi. Penser que les électeurs vont gentiment comprendre les états d’âmes des députés, ou adhérer à leurs justifications, est une erreur qui conduira tôt ou tard à une sanction venant des urnes. Oubliez comment le PS a sombré à la suite de ses nombreuses trahisons serait une amnésie lourde de conséquences, notamment pour les LR dont la santé électorale est plus que chancelante.

La réforme des retraites doit donner l’occasion de nous débarrasser de ce gouvernement. Laisseront-ils une fois de plus Macron gagner, ou saisiront-ils enfin l’opportunité d’en finir avec ce régime hautain et autoritaire ? Faites vos jeux, mais il est à craindre que tant que certains n’auront pas vécu sur le terrain la colère des administrés, ils ne comprendront pas que leurs postures idéologiques mal calculées commencent à exaspérer.