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4 mars 2023

La traîtrise érigée en gestion

Pierre Duriot

Interrogé en commission d’enquête, Arnaud Montebourg, ex-ministre de l’Économie, n’y va pas avec le dos de la cuiller et explique comment les intérêts personnels de quelques-uns, ont achevé la France industrielle : le tout pour 10 à 15 millions d’Euros. Dans le collimateur de l’ex-ministre du gouvernement Valls, Patrick Kron, ancien président d’Alstom et principal artisan de la vente de ce fleuron national aux Américains. Montebourg explique même qu’il a été menacé, par l’intéressé, d’un plan social de 5000 licenciements, s’il tentait de s’opposer à la vente. Et rappelle une convocation, manu-militari, dans le bureau ministériel, pour tancer Kron, qu’il traite de traître et dont il souligne l’intelligence avec une puissance étrangère.

Montebourg renvoie dos à dos les membres du gouvernement et les chefs d’entreprises, Macron qui donne son aval, mais aussi les PDG, qui privilégient leurs trajectoires personnelles au détriment du pays qui les a instruits et mis là où ils sont, à la direction des grandes boîtes. En quinze ans, sont partis, Alstom, Arcelor, Péchiney, Tecnip, Lafarge, Alcatel, Essilor, tous dans les premiers mondiaux de leur spécialité, tous français et tous ayant pu être protégés du rachat, ou du démantèlement, par les gouvernements successifs qui n’ont pourtant rien fait. À ceci, on peut ajouter des PME de pointe des secteurs militaires et de l’électronique. Dans le sillage de ces pertes, l’ensemble des sous-traitants, c’est-à-dire, le double statistiquement, puisque l’ensemble des sous-traitants d’une grosse boîte équivaut grosso-modo à l’effectif de la boîte en question. Voilà comment a disparu notre tissu industriel.

Montebourg parle sans ambiguïté de trahison, d’intelligence avec des puissances étrangères, d’incompétence, de manque de vision nationale et d’égoïsmes personnels, qui font que des ministres, ou des grands capitaines d’industrie, ont préféré ruiner leur pays, en échange de sommes comprises entre 10 et 15 millions d’Euros, en réalité, dérisoires, à ce niveau de responsabilité : le pays ne vaut pas cher et la reconnaissance du ventre n’est même pas de mise. Si l’ex-ministre a raison, cela ouvre la voie à des procès, à l’heure où l’on saisit les avoirs des oligarques russes, on pourrait aussi saisir ceux des oligarques français, à titre de dédommagement et s’atteler à la reconstruction de ces outils perdus, avec des personnes fiables et fidèles à leur pays. Que font les juges ? Au RPF, nous sommes sur la même ligne depuis des mois, demandons un audit des finances publiques, alors que tout tombe en ruine, malgré un taux d’imposition record et un grand coup de balai parmi les traîtres.