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21 mars 2023

UN ÉLOGE TEMPÉRÉ DU HAUT MOYEN-ÂGE

Gabriel Nerciat

Certes, le peuple français a beaucoup de défauts (ceux qui doutent qu'il y ait encore un peuple français devraient mieux regarder ce qui se passe depuis deux mois dans le pays, et se demander notamment pourquoi la population majoritairement allogène des banlieues est aussi absente de ce mouvement contre la réforme des retraites qu'elle l'avait été de l'insurrection des Gilets jaunes), et je suis le premier à dire souvent lesquels.
Mais il a quand même une vertu, et qui ne se dément pas : il sait remarquablement, mine de rien, comment circonvenir et neutraliser la plupart des fats et des nuisibles qui se croient autorisés à menacer ses droits ou à déconstruire la souveraineté (et/ou les libertés) que ses aïeux ont conquis.
Moi le premier, je l'ai écrit ici, je pensais que le Banquier Président et ses robots parviendraient sans trop de mal à remporter la partie, dès lors qu'ils avaient obtenu un second mandat grâce à l'épidémie de covid, aux dizaines de milliards jetés par les fenêtres, à la guerre en Ukraine et à l'insondable lâcheté bouffonne et braillarde de la gauche mélenchoniste.
Eh bien, non : à peine un an après sa réélection en trompe-l'oeil, Macron est désormais empêché et ligoté comme un esclave dans une séance sépulcrale de BDSM.
Tous les moyens mis à sa disposition par la Constitution de 1958 pour sortir de la crise qu'il a provoquée lui sont plus ou moins interdits car ils se retourneraient automatiquement contre lui : dissolution de l'Assemblée nationale, changement de gouvernement ou référendum.
Pas de possibilité de gouverner avec les LR, non plus : ces derniers, bien qu'ils se soient tirés une balle dans la tête en empêchant de peu la chute d'Elisabeth Borne, ne peuvent pas faire autrement que de durcir leur feinte opposition s'ils veulent avoir une maigre chance de survie (larvaire) dans leurs provinces morcelées.
Bref : pas de solution concevable, sinon un gouvernement par ordonnances qui, en l'absence de majorité parlementaire, n'aura les moyens d'aucune transformation notable ou profonde du pays.
Comme après la trahison de Jacques Chirac en 1995, le président est désormais condamné à une impuissance totale pour les quatre ans qui viennent. Et c'est avec le peuple français, hostile et de plus en plus sourdement violent à son endroit, qu'il va devoir cohabiter.
Ce fabuleux Mozart de la finance qui devait accomplir la grande révolution sociale-libérale et progressiste de la décennie tant attendue par nos élites et la partie la plus sénile de la bourgeoisie citadine va finir comme un roi fainéant mérovingien, en laissant complaisamment les Vikings et les Sarrasins venir délabrer et coloniser le pays qui l'a rejeté.
Tout ça, pour une réforme des retraites à la noix dictée par Bruxelles, et qui ne rapportera même pas huit milliards au budget de l'Etat. Une misère.
Vous me direz : ce n'est pas grandiose, la fin du Haut Moyen-Age. Mais on y prépare, faute de mieux, l'édification des futurs châteaux forts, et l'on sait qu'à terme les Vikings finiront par devenir des Normands, donc plutôt des gens biens.
De nos jours, il ne faut pas trop en demander non plus, les amis. Nous ne sommes ni Russes ni Chinois ni Indiens, que diable.