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18 octobre 2023

LA FRANCE DE DOMINIQUE BERNARD

Gabriel Nerciat

D'après ce que je lis depuis hier dans la presse, Dominique Bernard, le professeur assassiné par un islamiste tchétchène vendredi à Arras, père de trois filles, était un enseignant érudit, discret, ironique, consciencieux, étranger aux modes littéraires et culturelles, plutôt rétif à la doxa pédagogique en vogue rue de Grenelle, amoureux de littérature, de cinéma italien et de théâtre, et qui avait à cœur d'essayer de transmettre à ses élèves d'un obscur petit lycée de l'Artois le goût des romans hautement civilisés de Marcel Proust et de Julien Gracq.
Peut-être que je m'abuse sous l'effet de l'émotion, mais il me semble que, lycéen, j'aurais aimé avoir un professeur de lettres tel que lui.
Et j'espère qu'il y a encore beaucoup de professeurs de lettres, en France, aujourd'hui, qui lui ressemblent.
Les discours convenus du Banquier Président ou de son ministre de l'Intérieur, qui avaient promis il y a trois ans qu'il n'y aurait pas d'autres Samuel Paty, sont au-delà de l'indécence, mais tout le monde à peu près s'en moque.
La seule chose qui est sûre, c'est que si dans les années qui viennent aucune commune de France n'a le courage de nommer Dominique Bernard un collège ou un lycée de Paris ou de province, si le lamentable et pathétique maire centriste d'Arras n'a pas le retour de dignité et de vigueur nécessaire pour baptiser du nom de Dominique Bernard l'une des rues principales de sa ville, alors ce sera le signe définitif, univoque, visible, net, sans bavure, que nous sommes devenus un peuple de zombies, de froussards, d'eunuques, de lâches, de iels et d'esclaves consentants.