« Je ne suis pas un journaliste de gauche, je ne dénonce personne. »
Guy Debord
Tel est pris qui croyait prendre.
Après les socialistes et les écologistes, les députés du groupe présidentiel à l’Assemblée nationale sont appelés à ne plus répondre aux questions des journalistes du Journal du Dimanche.
Ils considèrent que la rédaction de l’hebdomadaire est désormais dirigée par « un journaliste d’extrême droite », Geoffroy Lejeune.
Passons sur le fait qu’encore une fois ceux qui dénoncent le rejet, l’ostracisme, la violence des mots, et la stigmatisation des individus en sont souvent les premiers auteurs. Chérir la liberté de la presse, d’expression et la diversité des points de vue devraient être une valeur cardinale pour ces grands démocrates, même si une partie de cette presse est selon eux, « polémiste et populiste ». Après tout, qui juge hormis le lecteur ? La presse libre est plurielle, elle l’a toujours été, elle le sera toujours.
Au-delà, ces censeurs putatifs du JDD, lui font indirectement un sacré coup de publicité en lui donnant du crédit. Car ils produisent le sentiment que le titre de presse, par ses questions et ses articles, embarrasse l’establishment fortement contesté dans la population. Bref, ils rendent la marque JDD populaire face à des journaux plus consensuels ou considérés comme plus proches du pouvoir.
Mais surtout, ces politiciens qui boycottent (expliquant dans d’autres situations que « le boycott c’est mal ») laissent le champ libre de l’expression politique à ceux qu’ils disent vouloir combattre.
Croire qu’on est tellement important que le JDD n’attendait qu’une chose, « leurs déclarations » ; que sans elles, le Journal du Dimanche ne pourra pas travailler, est une grave erreur de jugement guidée par l’orgueil.
En général, ce sont les interviewés qui sont sollicités par un journal. Ils ne veulent pas répondre ? Grand bien leur fasse, d’autres le feront. Assurément, personne ne s’en offusquera dans une rédaction. Allez hop, au suivant ! La nature de l’information a horreur du vide. Quoi qu’il arrive, le JDD sortira ses articles.
Pour s’amuser, imaginons maintenant l’inverse : le jour où une rédaction exprimera officiellement le souhait de ne plus interroger les députés de gauche ou de la majorité, de ne plus parler des actions du gouvernement. Quelles seraient alors les réactions des élus ? Sans doute extrêmement compréhensives, comme peut-être celles de certains lecteurs d’ailleurs qui vont chercher désormais leur information sur d’autres canaux alternatifs ?
Comme disait le journaliste Jean Jaurès : « Le courage, c'est de chercher la vérité et de la dire. » Voilà, c’est cela qui doit animer tous les protagonistes, rien d’autre.