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20 septembre 2022

Retraites, et si nous ne prenions pas le problème par le bon bout ?

Gilles La Carbona (RPF)

Un constat, le Conseil d’Orientation des Retraites vient d’annoncer un bilan positif du financement. Plus de 900 millions sont venus grossir la cagnotte et ce chiffre devrait passer à 3.2 milliards l’an prochain. L’organisme ne se prononce pas sur la suite, préférant rester sur les prévisions d’avant 2020, pour réaffirmer qu’avant 2032, il n’y aura pas de défaut de paiement. Et la brutale augmentation des décès au cours de l’été, totalement inexpliquée, va sans doute laisser des caisses encore plus pleines qu’aujourd’hui. Quant à l’échéance de 2032, les personnes nées en 1945 auront 87 ans, autant dire que beaucoup ne seront déjà plus de ce monde.
Le financement des retraites n’est, en soi, pas un problème, la preuve, dans un contexte présenté comme « compliqué », les caisses font des bénéfices. Il serait opportun que l’État remette également les 33 milliards du Fonds de réserve des retraites créé par Jospin et quelque peu détournés par Woerth... Après tout, depuis deux ans nous assistons à une valse de chèques impressionnante pour soutenir les mesures COVID et maintenant l’Ukraine, et nos dirigeants voudraient nous faire croire qu’ils ne peuvent pas trouver 33 milliards, quand en moins de deux ans ils en ont dépensé, au moins 10 fois plus. Ce n’est pas sérieux. Un salarié peut espérer arriver jusqu’à 64 ans sans avoir de soucis de motricité, au-delà, les choses se compliquent. Faut-il prendre ce prétexte pour user jusqu’à la corde un salarié et lui permettre de partir une fois ses réserves naturelles totalement épuisées ? Quelle société pourrait afficher de telles ambitions sans se faire taxer de monstrueuse ?
Et si depuis 25 ans, nous ne regardions pas le problème par le bon bout ? On s’attache à la conclusion du cycle du travail, alors qu’il faut assurer le chemin qui y mène. L’âge moyen d’entrée dans la vie active est de 27 ans, soit environ 10 ans de plus qu’il y a trente ans. Quelle perte colossale de revenus de cotisations. Imaginez, un jeune actuel qui débute à 27 ans, doit cotiser 42 ans, ce qui lui donnera une pension à taux plein à 69 ans. Rallonger l’âge de départ n’arrangera pas sa situation puisqu’il devra intrinsèquement cotiser plus.
Et si, au lieu d’augmenter le nombre d’annuités de cotisation, ou l’âge légal de la retraite, on s’attachait à faire entrer nos jeunes bien avant 27 ans ? En fait, ce n’est pas le système de retraite qu’il faut réformer pour assurer son financement, mais bien tout ce qu’il y a autour de lui. La formation, l’apprentissage, la réindustrialisation. Faire en sorte que les délocalisations ne soient plus cette manne providentielle pour les tenants de la rente. En appliquant la réforme de capitalisation par points de Macron, ça ne fera qu’inciter les fonds de pensions, détenteurs du système, à chercher toujours plus de profits. Non seulement vous ne sauverez pas les retraites et encore moins les salariés, mais en plus vous contribuerez à la spéculation et à de nouvelles délocalisations, en clair, à la destruction définitive de notre tissu économique. Comment croyez vous que la capitalisation sera prise en compte, si le chômage explose, ou si les emplois proposés sont sous-qualifiés ? Pensez vous sincèrement qu’un minimum de revenu pourra être assuré, si en face, les cotisations ne rentrent pas ?
De plus, par quel miracle deux systèmes totalement différents vont-ils coexister financièrement, sans devoir mettre en place un mécanisme d’une complexité et d’une lourdeur, comme seule la France est capable d’en imaginer ? Nous avons jusqu’en 2032 pour réformer ce qui doit l’être et permettre à nos jeunes de trouver rapidement du travail, de cotiser et donc d’assurer, comme l’avait pensé le général de Gaulle, la pérennité du système de répartition, tout en cimentant le socle républicain, qui se veut solidaire entre générations, et non individualiste, comme le préconise la doctrine macroniste.
Il est temps de revoir notre vision du problème, nous avons largement le temps et les moyens d’y parvenir. Ce n’est donc pas le système des retraites que vous devez réformer, mais tout ce qui conduit à pouvoir prétendre à un travail correctement rémunéré, en obtenant des diplômes valorisés et utiles et en travaillant sur le sol national, sans devoir s’expatrier, faute de trouver des entreprises sur place. Renvoyez donc cette réforme aux calendes grecques, et proposez à sa place, les mesures nécessaires pour permettre une création d’emplois sur le long terme.